LE VRAI DIABLE
Par
Alan Hayward
TABLE DES MATIÈRES
1. Deux interprétations
2. Commençons par le commencement
3. Les croyances des Juifs
4. Le diable dans le Nouveau Testament
5. Comment le Seigneur Jésus conquit le diable
6. Le problème des démoniaques
7. D’où vient vraiment le péché ?
8. Conclusions
9. Appendice - Quelques passages problématiques :
Satan tombé du ciel
Le grand dragon rouge
Éprouver les esprits
Les esprits en prison
Les anges qui avaient péché
Les esprits méchants dans les lieux célestes
LE VRAI DIABLE
1. DEUX INTERPRÉTATIONS
Un jour, un accusé déclara au juge : « Oui, j’ai commis le crime dont on
m’accuse, mais je ne suis pas coupable. Je n’ai pas pu m’en empêcher, car
j’étais possédé du diable au moment du crime » ! Nul besoin d’ajouter qu’il fut
condamné.
Dans le monde entier on s’intéresse de plus en plus au domaine occulte. On
raconte beaucoup d’histoires étranges de gens possédés et sous le contrôle du
diable ou d’un esprit malin moindre.
Qu’y a-t-il de vrai dans ces histoires ? Existe-t-il vraiment un Prince des
Ténèbres, à la tête d’une armée nombreuse et invisible d’esprits malins
parcourant le monde, et qui sont la cause véritable de toute la méchanceté et
des souffrances du monde ? Ou s’agit-il d’un mythe, comme le Père Noël et les
fées ?
Le seul moyen d’obtenir la réponse véridique consiste à consulter la Bible, qui
est bien à même de nous éclairer. Mais il faut considérer la Bible très, très
attentivement, car ce qu’elle nous enseigne sur le diable est souvent mal
compris.
Le point de vue
notoire
La plupart des gens qui croient en Dieu et en Jésus-Christ croient aussi au
diable, autrement connu sous le nom de Satan. Questionnés sur le diable, ils
répondraient probablement ainsi : « C’est un ange déchu, autrefois l’un des
plus célèbres au ciel. Mais il s’enorgueillit et se révolta contre Dieu. Alors
Dieu chassa Satan du ciel, de même que tous les anges qui se rallièrent à lui.
Maintenant Satan et ses disciples maléfiques habitent la terre en tant qu’esprits
malins, incitant les hommes à pécher ».
Mais certains, dont l’auteur de ce livret, ne peuvent accepter ce point de vue.
Il compare plutôt Dieu à un homme qui, trouvant sa maison infestée de rats,
s’en débarrasserait en les chassant dans la maison du voisin !
Évidemment, la façon correcte de se débarrasser d’un fléau de rats serait de
les détruire. Un brave homme ne les obligerait pas à filer chez son voisin.
Pourquoi donc Dieu, se trouvant ainsi aux prises avec une bande d’anges
rebelles, les aurait-Il chassés de Sa maison céleste pour nous importuner ?
Pourquoi ne les aurait-Il pas détruits ?
Si l’on se pose la même question concernant les êtres humains dissolus, la
réponse est simple. Les méchants sont capables de repentance, et Dieu, dans Sa
miséricorde, leur accorde le droit de vivre pour un temps, afin qu’ils aient la
possibilité d’obtenir le salut. Mais nulle part dans la Bible il n’est suggéré
que le diable puisse se réformer et être sauvé de son péché. Pourquoi donc, si
le diable est un ange rebelle, Dieu le laisse-t-Il vivre ?
Si ce problème vous préoccupe, cela vous intéressera peut-être de savoir que
certains croyants en la Bible ne considèrent pas le diable comme un ange déchu.
Ces croyants, de nos jours, restent attachés à une interprétation qui a
toujours été adoptée dans le passé par beaucoup de lecteurs attentifs de la
Bible.
L’autre interprétation
Le diable existe ; un diable terrible, mortel. Que l’on ne s’y trompe pas. Mais
selon cette autre interprétation, que j’adopte moi-même, le diable n’est pas un
ange déchu. Le vrai diable est quelque chose de pire même qu’un ange déchu.
Cela vous paraît-il peu probable ? Pourrait-il y avoir quelque chose de pire
qu’un esprit très méchant combattant contre nous ? Une seule chose pourrait l’être…
Quoi de pire qu’un ennemi qui pilonne de ses canons les murailles d’une
forteresse ? C’est un traître : c’est un ennemi qui attaque de l’intérieur.
Selon cette autre interprétation, voilà l’identité réelle du diable : un ennemi
qui vient de notre for intérieur. Autrement dit, quand la Bible parle du
diable, elle présente une sorte de parabole. Le diable de la Bible englobe
toute la méchanceté qui réside au cœur des hommes et des femmes.
Du temps de la Réforme protestante, quand on étudiait la Bible avec zèle à la
recherche de la vérité, cette interprétation était très répandue. Lauran Pain,
qui, lui, semble avoir cru en un ange déchu, le reconnaît dans son étude
historique de la question. Il écrit : « La Réforme donna l’impulsion à l’idée
que les diables ne sont pas obligatoirement des entités individuelles, mais
peuvent en fait se trouver dans les pensées méchantes innées et dans les
actions individuelles malfaisantes ».
Les Christadelphes considèrent Satan comme une simple description du cœur
humain, et ils ne sont pas les seuls. Mais cela dit, la question fondamentale
s’impose : quel est l’enseignement de la Bible ?
A cette question, l’étude qui suit cherche à répondre. En la lisant essayons de
garder un esprit ouvert. Il y a de bien meilleures raisons à l’appui de cette
deuxième interprétation de Satan que n’en indiquent les apparences.
2. COMMENÇONS PAR LE COMMENCEMENT
Adoptons la règle d’or de toute étude biblique : commencer au commencement.
C’est le bon sens élémentaire. La seule façon de comprendre n’importe quel
livre est de commencer par le Chapitre 1 et de progresser jusqu’à la fin.
Pourtant très peu de gens suivent cette méthode quand il s’agit de la Bible, ce
qui est bien surprenant. Quand on demande à quelqu’un de prouver, d’après la Bible,
que Satan est un ange déchu, par où commence-t-on ? On commence presque
certainement au Nouveau Testament, et probablement au tout dernier livre du
Nouveau Testament, le Livre de l’Apocalypse. Presque invariablement on ne cite
rien avant le Livre de Job, vers la fin de la première moitié de la Bible.
Évitons donc cette erreur commune et commençons logiquement au tout premier
chapitre de la Bible. Les trois premiers chapitres du premier livre, la Genèse,
nous décrivent comment Dieu créa le monde et les premiers êtres humains, Adam
et Eve. Il leur donna une loi à respecter, mais ils Lui désobéirent.
En ce temps-là, paraît-il, « Le
serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs, que l’Éternel Dieu
avait faits » (Genèse 3.1). Il semble que le serpent ait pu
marcher debout, et il avait certainement le don de la parole, dont il se servit
pour induire Eve et son mari à pécher.
Ceux qui croient en un diable, ange déchu, répondront peut-être : « Oui, mais
ce n’était pas simplement un serpent ; c’était Satan qui avait pris possession
du corps du serpent et qui parlait par sa bouche ». Cette suggestion ne
commande qu’une seule question : où cela est-il dit ? Le Livre de la Genèse ne
l’indique certainement pas !
Il est dit explicitement dans la Genèse que le serpent s’adressa à la femme. On
n’y trouve la moindre allusion à la présence d’un esprit malin. De même,
l’apôtre Paul se référant à cet incident déclare :
« le serpent séduisit Eve par sa ruse » (2
Corinthiens 11.3). Il ne dit pas « Satan séduisit Eve », comme tant de gens
l’imaginent erronément, mais « le serpent ».
Il est intéressant de noter que Paul ne parle pas d’un serpent « méchant »,
mais simplement « rusé », et que le Seigneur Jésus se sert de
l’expression « prudents comme les
serpents » (Matthieu 10.16). Dieu n’a jamais imposé de lois
aux animaux, comme Il en a donné aux humains. Par conséquent, un animal ne peut
pécher, même s’il lui est possible d’inciter les humains à le faire.
Paul ne blâme pas Satan pour le péché d’Adam. Bien qu’il parle de la chute
d’Adam en plusieurs endroits, Paul ne mentionne pas une seule fois le diable ou
Satan dans ce contexte. Au contraire, il nous explique clairement à qui revient
la faute :
« par un seul homme le péché est entré
dans le monde… Adam » (Romains 5.12‑14).
Le seul passage du Nouveau Testament qui paraisse enseigner le contraire est
Apocalypse 12, où, au verset 9, une créature étrange, ayant sept têtes, reçoit
le nom de « serpent ancien, appelé le
diable et Satan ». Comme le Livre de l’Apocalypse n’est pas un
livre d’histoire, ce passage ne décrit pas les événements passés du Jardin
d’Éden. Selon le tout premier verset de l’Apocalypse, elle a été donnée pour
montrer « les choses qui doivent
arriver bientôt », donc les futurs événements sur la terre, sous
forme de parabole. L’Apocalypse ne nous informe pas que le serpent d’Éden était
un ange déchu, mais, au contraire, nous décrit un serpent ayant sept têtes.
Comment pourrait-on y voir une description du serpent d’Éden ?
Ainsi donc, le message de la Genèse et celui d’autres livres bibliques s’y
référant ressortent clairement. On ne peut attribuer la méchanceté de la nature
humaine à un ange déchu. Il faut faire retomber le blâme sur les coupables :
sur Adam, et sur ses descendants pécheurs, nous-mêmes inclus.
La Loi de Moïse
Les cinq premiers livres de la Bible — Genèse, Exode, Lévitique, Nombres et
Deutéronome — reçoivent dans leur ensemble le nom de « Loi de Moïse », parce
que Moïse les écrivit. Ils représentent un peu plus d’un sixième de la Bible
actuelle, mais pendant des centaines d’années ils constituaient la seule Bible
que possédât le peuple de Dieu, parce que le reste de la Bible n’avait pas
encore été écrit.
Néanmoins, la Loi de Moïse englobait un guide complet pour le peuple de Dieu de
ce temps-là. Elle leur expliquait comment éviter le péché, et quel genre de vie
Dieu attendait d’eux. Pourtant elle ne mentionne jamais le diable ou Satan -
pas une seule fois.
Cette constatation provoque une question importante. S’il y a vraiment un ange
déchu qui pousse les humains à pécher, pourquoi Dieu, n’a-t-Il pas averti Son
peuple de ce danger mortel quand Il lui donna Sa révélation, la Loi de Moïse ?
Selon les apparences, Dieu n’avait pas l’intention de laisser croire son peuple
des temps anciens à un diable, ange déchu.
Naturellement, à lui seul, cet argument basé sur l’omission ne peut convaincre.
Mais du moins est-ce un point valide à noter tandis que l’étude se poursuit.
D’autres livres de l’Ancien Testament
L’Ancien Testament, dans son ensemble, forme plus des trois quarts de la Bible.
Pourtant dans l’Ancien Testament tout entier le diable n’est jamais mentionné
sous ce nom, pas une seule fois.
Même le nom propre « Satan » n’apparaît que trois ou quatre fois dans l’Ancien
Testament. On peut en déduire, semble-t-il, que Satan ne représentait pas une
partie très importante de l’enseignement de l’Ancien Testament. Essayons de
découvrir l’identité de ce Satan qui remplit un rôle si effacé dans l’histoire
de l’Ancien Testament.
Le nom propre « Satan » n’était pas simplement un nom démuni de sens, comme
beaucoup de nos noms modernes. Ce nom-là avait un sens très clair, comme Eve («
vie ») ou Abraham (« père d’une multitude »). L’Ancien Testament fut écrit
principalement en hébreu, et satan est
un mot hébreu signifiant accusateur, ennemi ou adversaire. Quand ce mot satan
apparaît en nom propre, il est en général précédé de l’équivalent hébreu du mot
« le ». Le nom signifie donc « l’Accusateur », « l’Ennemi » ou « l’Adversaire
».
Voici les seuls passages de l’Ancien Testament hébreu où l’on trouve ce mot
Satan présenté, semble-t-il, afin d’être considéré comme nom propre : Psaume
109.6 ; 1 Chroniques 21.1 ; Job, chapitres 1 et 2 ; Zacharie 3.1‑2.
Au Psaume 109.6, la plupart des versions françaises ne gardent pas le nom
Satan. La version Segond et la version synodale le traduisent par « un
accusateur », et la version d’Ostervald par « l’adversaire ». Les érudits
pensent maintenant que l’auteur hébreu ne destinait pas le mot satan à être pris comme nom propre
dans ce passage. De toute évidence, dans ce cas du moins, « l’accusateur » ou «
l’adversaire » se rapporte à un simple homme.
Examinons 1 Chroniques 21.1, où la plupart des traductions considèrent Satan
comme nom propre. Même dans ce cas, certains traducteurs modernes annotent que
le mot Satan peut très bien être traduit par « l’adversaire ». On a, en fait,
de bonnes raisons de croire qu’à 1 Chroniques 21.1 le nom hébreu, Satan, «
l’Ennemi », se rapporte à une armée ennemie qui, en effrayant David, le poussa
à faire le dénombrement de ses soldats. Un autre récit du même événement (2 Samuel 24.1) déclare que
Dieu excita David à faire ce recensement.
Cela ne veut pas dire que « l’Ennemi » était Dieu Lui-même ! Dans tout le reste
de la Bible, quand Satan apparaît en nom propre, c’est-à-dire précédé de
l’équivalent hébreu ou grec du mot « le » — « l’Ennemi » — il ne représente
jamais rien de bon. Il se réfère toujours à ce qui est mauvais, comme la
méchanceté de la nature humaine, ou des hommes qui s’opposent à Dieu ou au
peuple de Dieu ; il paraît donc peu probable qu’il se réfère à Dieu dans ce
verset.
Néanmoins, la Bible ne se contredisant pas, essayons d’expliquer comment « Dieu
» et « l’Ennemi » pourraient tous deux avoir été la cause de l’action de David.
Cela n’est pas trop difficile lorsqu’on examine ce que Dieu dit à Jérusalem par
le prophète Ésaïe : « Je (Dieu)
t’investirai de toutes parts, je te cernerai par des postes armés, j’élèverai
contre toi des retranchements » (Ésaïe 29.3). Évidemment, Dieu
n’accomplit pas toutes ces actions Lui-même. Ce verset prouve clairement que
Dieu provoqua une armée ennemie à l’action. Pareillement, 1 Chroniques 21.1
et 2 Samuel 24.1 sont
tous deux d’accord pour nous faire savoir que l’ennemi humain d’Israël, en
effrayant David, l’excita à mal faire, mais que Dieu fut l’instigateur de la
présence de cette armée ennemie.
Toutefois, si l’on voit en Satan un grand être maléfique, on ne parvient absolument
pas à expliquer la contradiction entre 1 Chroniques 21.1 et 2 Samuel 24.1. Tentez-le, et
vous verrez par vous-même son impossibilité, à moins de soutenir que Dieu
dirige les actions de cet esprit maléfique, argument totalement opposé à l’idée
que la plupart des gens se font de Satan.
Job et Zacharie
Il ne nous reste que deux passages de l’Ancien Testament où Satan est
clairement présenté en nom propre, et où, selon les apparences, on pourrait le
prendre pour une sorte d’être surnaturel : Job 1 et 2 et Zacharie 3.
Mais cela n’est pas forcément le cas. L’Ancien Testament présente quelquefois
de simples humains comme des êtres surnaturels, uniquement pour souligner une
caractéristique. Considérons, par exemple, ce passage :
« Dieu se tient dans l’assemblée de Dieu,
il juge au milieu des dieux… J’avais dit (c’est Dieu qui
parle) : Vous êtes des dieux, vous
êtes tous des fils du Très-Haut. Cependant vous mourrez comme des hommes » (Psaume
82.1, 6, 7).
Qui furent ces êtres que Dieu appela « dieux » ? Nul besoin de chercher à
deviner. Le Seigneur Jésus-Christ nous le dit. Il cita ce passage, et expliqua
que ces « dieux » étaient purement et simplement des êtres humains « à qui la parole de Dieu a été adressée » (Jean
10.34‑35). En d’autres termes, c’étaient des Israélites. Dieu les
appelait « dieux » pour faire ressortir les hauts privilèges de ces gens.
De même, il semble évident que le « Satan » de Job et de Zacharie, n’était pas
vraiment un être surnaturel. « Satan » — « l’Ennemi » — dans ces deux livres
aurait pu être un homme particulièrement méchant qui s’opposait à Dieu à cette
époque-là ; ou bien le nom aurait pu être choisi comme une sorte de symbole,
pour représenter toute l’opposition humaine méchante, à Dieu et au peuple de
Dieu. (Il y a un parallèle intéressant à Deutéronome 32.15. Dans certaines
versions on trouve le nom Jésurun, mot qui donne l’impression d’être le nom
d’un homme. En fait c’est un nom symbolique, représentant une communauté
entière, ou, comme le précise l’annotation de la version synodale, le nom
poétique d’Israël. La version Segond met, tout simplement, « Israël ».)
Une étude détaillée des deux premiers chapitres de Job révèle que tel est le
cas. Ce Satan-là — « l’Ennemi » de Job — ne possédait lui-même aucun pouvoir
surnaturel. Satan dut emprunter à Dieu le pouvoir dont il se servit alors pour
faire souffrir Job (Job 1.11‑12).
Job lui-même déclara que ses souffrances venaient en fait de Dieu, et non de
quelque être surnaturel maléfique (Job 1.21 ;
2.10). De plus, la fin du Livre de Job nous décrit comment ses frères et
sœurs « le plaignirent et le
consolèrent de tous les malheurs que l’Éternel avait fait venir sur lui » (42.11
). Manifestement, ce Satan était un homme méchant, ou un groupe d’hommes
remplis de jalousie à l’égard de Job, à qui Dieu donna la possibilité de faire
souffrir Job, pour leur faire comprendre leur erreur.
Il reste Zacharie 3, qui nous dépeint le souverain sacrificateur Josué
confronté par Satan. Heureusement, ce chapitre nous est expliqué par le Livre
d’Esdras, qui nous donne un compte-rendu purement historique de la lutte de
Josué avec « Satan ». Esdras 3 décrit comment Josué induisit le peuple à
commencer de rebâtir les ruines du temple de Dieu. D’après Esdras 4.1‑4, « les ennemis de Juda et de Benjamin apprirent que
les fils de la captivité bâtissaient un temple à l’Éternel », alors
ils « découragèrent le peuple de Juda
; ils l’intimidèrent pour l’empêcher de bâtir ». Ces ennemis sont
représentés dans le langage parabolique de Zacharie 3 par Satan, « l’Ennemi ».
Qui fut Lucifer ?
Ceux qui croient à un diable, ange déchu, sont très désappointés par l’Ancien
Testament. Ils se rendent compte que l’Ancien Testament devrait spécifier que
Satan est un ange déchu, si c’est vraiment la croyance que Dieu attend de Ses
disciples. Alors, puisque l’on n’y trouve rien de tel, ils ont recherché dans
l’Ancien Testament ce qui pourrait servir de base à leur croyance. Ils peuvent
tirer parti de deux passages seulement, dont voici le premier :
« Te voilà tombé du ciel, astre brillant,
fils de l’aurore ! … Tu disais en ton cœur : Je monterai au ciel, j’élèverai
mon trône au-dessus des étoiles de Dieu… Mais tu as été précipité dans le
séjour des morts, dans les profondeurs de la fosse » (Ésaïe
14.12‑15).
Seule une situation désespérée dans la défense d’une théorie douteuse pourrait
contraindre quelqu’un à appliquer ce passage au diable. De toute évidence, un
ange n’y a rien à voir. Le verset suivant même en donne l’explication :
« Ceux qui te voient fixent sur toi leurs
regards, ils te considèrent attentivement : Est-ce là cet homme qui faisait
trembler la terre, qui ébranlait les royaumes ? » (verset 16).
Donc Lucifer n’était pas un ange : c’était un homme. Le début du chapitre nous
donne son identité exacte :
« Alors tu prononceras ce chant sur le roi
de Babylone, et tu diras… » (verset 4).
Il est facile de voir pourquoi ce grand homme fut qualifié d’« astre brillant » ou « Lucifer ».
Lucifer est l’ancien nom de Vénus, « l’étoile du matin », qui est l’astre le
plus brillant du ciel. Du temps de Babylone, ses rois étaient les plus
puissants sur la terre. Le prophète Daniel dit à l’un des rois les plus
célèbres de Babylone, Nebucadnetsar :
« C’est toi, ô roi, qui es devenu grand et
fort, dont la grandeur s’est accrue et s’est élevée jusqu’aux cieux, et dont la
domination s’étend jusqu’aux extrémités de la terre » (Daniel 4.22).
Mais le dernier des puissants rois de Babylone, dont la grandeur « s’est élevée jusqu’aux cieux », allait
être humilié. Son abaissement allait ébranler le monde d’alors : événement
aussi spectaculaire que si Lucifer (Vénus) était tombé du ciel.
Ésaïe 14 est clairement une description poétique de la chute du roi de
Babylone. Si d’aucuns déclarent : « Le verset parle du roi de Babylone, mais
veut dire Satan », ils se montrent coupables de récrire la Bible à leur gré.
Nos esprits modernes trouvent peut-être étrange que Dieu ait annoncé à ce roi
des temps anciens qu’il serait précipité du ciel dans le séjour des morts. Mais
ce langage figuré est très commun dans la Bible. Par exemple, rappelons les
reproches du Seigneur Jésus à la ville impénitente de Capernaüm, au pays
d’Israël :
« Et toi, Capernaüm, qui as été élevée
jusqu’au ciel, tu seras abaissée jusqu’en enfer » (Matthieu
11.23, Version Synodale).
Capernaüm n’était pas vraiment aux cieux : c’était simplement la façon choisie
par le Seigneur pour la dépeindre en ville grandiose et fière. De même, son
abaissement en enfer est le style imagé dont se sert la Bible pour décrire son
humiliation.
Le seul autre passage de l’Ancien Testament quelquefois attribué à tort à la
chute de Satan se trouve à Ézéchiel 28. Mais ce chapitre aussi déclare
explicitement que la personne en question est un roi humain. Le chapitre
commence ainsi :
« La parole de l’Éternel me fut adressée,
en ces mots : Fils de l’homme, dis au prince de Tyr : Ainsi parle le Seigneur,
l’Éternel… »
et continue par :
« Fils de l’homme, prononce une complainte
sur le roi de Tyr ! » (Ézéchiel 28.1‑2,12).
Ézéchiel dépeint ensuite ce roi de Tyr en chérubin ayant été en Éden, ce qui
incite certaines personnes à y voir Satan déguisé en roi. Leur conclusion est
sans fondement. Trois chapitres plus loin, Ézéchiel ajoute à la liste des rois
en Éden le roi d’Égypte et quelques autres rois. Or, ils n’ont tous pu être le
diable en personne ! De toute évidence, cette description d’Ézéchiel 31 adopte
un style poétique pour énumérer les hauts privilèges de ces rois, qui régnaient
dans une partie du monde où Dieu était à l’œuvre parmi Son peuple, Israël.
Nous voyons, donc, qu’il n’y a aucun mot dans l’Ancien Testament qui permette
de prouver que Satan est un ange déchu. Il n’y en a d’ailleurs aucun non plus
dans le Nouveau Testament. Il existe seulement deux passages du Nouveau
Testament où il est question d’un Satan qui tombe du ciel, et même ceux-ci ne
spécifient pas que Satan fut une fois un ange.
3. LES CROYANCES
DES JUIFS
Il est possible de résumer ainsi le témoignage de l’Ancien Testament. Le diable
n’est mentionné nulle part dans l’Ancien Testament. Satan n’est mentionné qu’à
partir de la deuxième moitié de l’Ancien Testament, et alors seulement en
quatre endroits. Dans deux de ceux-ci, le mot se réfère clairement à un ennemi
humain ordinaire. Dans les deux autres, Satan est probablement un symbole de la
méchanceté humaine, s’opposant à Dieu et à Son peuple. Il n’est nulle part
question d’un ange révolté contre Dieu et renvoyé du ciel.
L’Ancien Testament est un livre juif. Comment les Juifs eux-mêmes
comprenaient-ils les quatre références à Satan dans l’Ancien Testament ?
Croyaient-ils à un Satan surnaturel, ou considéraient-ils Satan comme un
symbole de la méchanceté humaine ?
Voici les écrits de trois érudits qui ont répondu à cette question, pas un seul
d’entre eux n’est Christadelphe.
Il est clair que du temps de
l’Ancien Testament les Juifs ne croyaient pas en un Satan surnaturel. Ils
partageaient évidemment le point de vue de l’auteur de cette étude : que Satan
est une sorte de parabole, un symbole du péché humain.
Qui inventa le Diable surnaturel ?
Nous avons vu que l’Ancien Testament n’enseigne pas la doctrine d’un Satan,
esprit méchant. Les érudits nous font savoir que les Juifs anciens n’y
croyaient pas non plus. Pourtant, du temps du Christ, beaucoup de Juifs et
beaucoup de Gentils avaient adopté la croyance en un Satan, ange déchu. D’où
vient cette doctrine ?
Les historiens expliquent qu’elle débuta dans le pays connu sous le nom de
Perse, qu’on appelle aujourd’hui l’Iran. Environ cinq cents ans avant
Jésus-Christ, les Juifs dépendaient de l’Empire perse, et ils apprirent à bien
connaître les croyances religieuses des Perses.
La religion perse finit par être connue sous le nom de Zoroastrisme. Les Perses
croyaient en de nombreux dieux, mais surtout en deux grands êtres surnaturels.
L’un, esprit bon, reçut le nom d’Ahura Mazda, dieu de la lumière et source du
bonheur. L’autre était un esprit mauvais, appelé Angra Mainyu, le dieu des
ténèbres et la source du malheur. Les Perses pensaient que ces deux grandes
puissances combattaient constamment pour la possession du monde et pour les
âmes humaines.
L’un des prophètes de l’Ancien Testament, Ésaïe, s’inquiétait de cette fausse
doctrine, peut-être parce qu’il prévoyait comment certains Juifs pourraient se
laisser influencer par elle. Donc, dans une de ses prophéties, il s’attaque
directement à la religion perse. Désirant peut-être s’assurer que tout le monde
puisse saisir son argument, il adresse cette prophétie à Cyrus, roi de Perse :
« Ainsi parle l’Éternel à son oint, à Cyrus…
Je suis l’Éternel, et il n’y en a point d’autre, à part moi, il n’y a point de
Dieu… Je forme la lumière, et je crée les ténèbres ; moi, l’Éternel, je fais
toutes ces choses » (Ésaïe 45.1‑7).
En d’autres termes, Dieu déclare que la religion du Zoroastrisme est une
religion fausse. Il n’y a pas deux puissances surnaturelles, il n’y en a qu’une
seule : Dieu Lui-même. Angra Mainyu, la Puissance des Ténèbres, n’existe pas.
L’Éternel Dieu est la source, à la fois, de la lumière et de l’obscurité, de la
joie et de la souffrance.
Ésaïe ne fut pas le premier à enseigner cette vérité. Des centaines d’années
auparavant, dans l’un des premiers livres de la Bible, Dieu avait dit par
l’intermédiaire de Moïse :
« Sachez donc que c’est moi qui suis Dieu,
et qu’il n’y a point de dieu près de moi ; je fais vivre et je fais mourir, je
blesse et je guéris, et personne ne délivre de ma main » (Deutéronome
32.39).
Il ne dit pas : « Satan blesse et
Dieu guérit », mais : «
Dieu blesse et Dieu guérit ».
Les mauvais
esprits dans l’Ancien Testament
Un autre moyen de connaître les croyances des Juifs anciens est d’étudier dans
l’Ancien Testament les références aux mauvais esprits.
Dans l’ensemble de l’Ancien Testament il y a très peu de passages qui font
mention de mauvais esprits ou de choses similaires. En voici une liste
complète. Elle mérite d’être examinée avec soin, car si on n’a jamais remarqué
ces passages auparavant, ils peuvent étonner :
« Alors Dieu envoya un mauvais esprit
entre Abimélec et les habitants de Sichem » (Juges 9.23) ;
« L’esprit de l’Éternel se retira de Saül,
qui fut agité par un mauvais esprit venant de l’Éternel. Les serviteurs de Saül
lui dirent : Voici, un mauvais esprit venant de Dieu t’agite. Que notre
seigneur parle ! Tes serviteurs sont devant toi. Ils chercheront un homme qui
sache jouer de la harpe ; et, quand le mauvais esprit venant de Dieu sera sur
toi, il jouera de sa main et tu seras soulagé » (1 Samuel 16.14-16) ;
« Le lendemain, le mauvais esprit venant
de Dieu saisit Saül, qui eut des accès de délire au milieu de la maison » (1 Samuel 18.10) ;
« Alors le mauvais esprit venant de
l’Éternel fut sur Saül, qui était assis dans sa maison, sa lance à la main.
David jouait, et Saül voulut le frapper avec sa lance contre la paroi » (1 Samuel 19.9‑10) ;
« Et maintenant, voici, l’Éternel a mis un
esprit de mensonge dans la bouche de tous tes prophètes qui sont là » (1
Rois 22.23 ; voir aussi versets 19‑22) ;
« Il (Dieu) déchaîna contre eux (les
Égyptiens) l’ardeur de son courroux,
la fureur, l’indignation, la colère, toute une armée d’anges du malheur » (Psaume
78.49, Version Synodale) ;
« L’Éternel envoya la peste en Israël…
Comme l’ange étendait la main sur Jérusalem pour la détruire, l’Éternel se
repentit de ce mal, et il dit à l’ange qui faisait périr le peuple : Assez !
Retire maintenant ta main » (2 Samuel 24.15‑16).
De mauvais esprits venant de l’Éternel, des anges de malheur, un ange faisant
périr : c’est tout ce que l’Ancien Testament nous dit sur les « mauvais esprits
». Voilà plus qu’il n’en faut pour montrer les croyances du peuple de Dieu du
temps de l’Ancien Testament.
Pour eux, les mauvais esprits ne signifiaient pas des esprits méchants. Ils n’y
voyaient pas des esprits indépendants agissant à l’insu de Dieu. Pour les
enfants d’Israël de ce temps-là, les mauvais esprits étaient des esprits
justes, des esprits qui agissaient au commandement de Dieu, et qui
accomplissaient Sa volonté — en fait, des anges saints, qui punissaient les
pécheurs.
On les appelait « mauvais » esprits, simplement parce que les humains qui
recevaient la punition la considéraient comme un malheur. Dans ces passages
bibliques, comme dans beaucoup d’autres, le mot « mauvais » ne signifie pas «
méchants » (bien que parfois il en ait le sens) ; il signifie « quelque chose
de désagréable », ou « souffrance ». C’est le « mal » dans le sens employé par
Job, quand il tombe malade ; il s’écrie : « Quoi ! nous recevons de Dieu le bien, et nous ne recevrions pas aussi
le mal ! » (Job 2.10).
On trouve beaucoup de références aux anges dans l’Ancien Testament, et dans
chaque cas les anges sont décrits comme des créatures sous le contrôle de Dieu.
Il n’existe aucune suggestion qu’il serait possible à un ange de désobéir à
Dieu. L’éventualité d’une révolte au ciel semble éliminée par ces versets :
« L’Éternel a établi son trône dans les
cieux, et son règne domine sur toutes choses. Bénissez l’Éternel, vous ses
anges, qui êtes puissants en force, et qui exécutez ses ordres, en obéissant à
la voix de sa parole » (Psaume 103.19‑20).
Une réponse claire
En conclusion, nous avons vu la réponse claire à cette question : quelles
croyances Dieu attendait-Il de Sa nation ancienne d’Israël ? Ce sont les
suivantes :
Dieu est tout-puissant. Il est Maître de l’univers qu’Il créa. Il n’y a pas
d’autres dieux, il n’y a pas d’autres esprits, à part Ses propres anges, qui
font toujours Sa volonté. Dieu est la source, à la fois, du bonheur et du
malheur, de la joie et de la souffrance. Il ne tolère qu’un seul rebelle dans
Son univers : l’homme, et cela seulement parce que certains hommes sont
susceptibles d’être rachetés de leur déchéance.
Quant aux anges déchus, ou esprits rebelles, l’Ancien Testament n’en fait
aucune mention.
4. LE DIABLE DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
Dès qu’on passe de l’Ancien Testament au Nouveau, un gros problème se présente.
Là Satan reçoit un deuxième nom, le diable, dont il est fait mention presque
autant dans le premier livre du Nouveau Testament que dans l’ensemble des
trente-neuf livres de l’Ancien. Au premier abord, le diable du Nouveau
Testament paraît être un grand esprit monstrueux, et tous les mauvais esprits
du Nouveau Testament paraissent accomplir les œuvres du diable — non pas celles
de Dieu comme dans l’Ancien Testament.
Beaucoup d’incrédules et de Juifs en donnent une explication simple. Ils
soutiennent que le Nouveau Testament contredit l’Ancien. Ils concèdent
l’absence d’un diable surnaturel dans l’enseignement de l’Ancien Testament,
mais ils prétendent que le Nouveau Testament enseigne le contraire.
Aucun croyant ne pourrait accepter cette explication. La Bible ne se contredit
pas. Le Seigneur Jésus-Christ lui-même nous commande de croire à tout le
contenu de l’Ancien Testament. (Voir Luc 24.25‑27 ; Jean 5.45‑47 ;
Luc 16.31 ; Jean 10.35, Luc 16.17 ; Matthieu 5.18.)
Non, il est impossible que le Nouveau Testament puisse contredire l’Ancien. Il
doit y avoir une meilleure explication. Essayons de la trouver.
La clé qui n’ouvre pas
Imaginons avoir accepté un nouvel emploi : celui de concierge d’un grand groupe
de bureaux neufs. Le gérant nous a donné ce qu’il appelle un passe-partout, qui,
affirme-t-il, ouvrira toutes les portes des bureaux.
Après son départ, nous décidons d’essayer ce passe-partout. La clé, engagée
dans la première serrure, l’ouvre facilement. Il en est de même de la deuxième
et de la suivante. La quatrième tentative est difficile, mais, avec un peu
d’effort, nous arrivons à tourner la clé. Nous finissons par donner deux autres
tours de clé, puis nous remettons la clé dans notre poche, satisfaits qu’elle
est vraiment un passe-partout qui ouvrira tout.
Mais le lendemain nous déçoit. En essayant d’ouvrir une autre porte nous
trouvons que rien ne peut faire tourner la clé. Nous décidons alors de faire le
tour du bâtiment pour essayer toutes les portes.
Finalement, nous arrivons à la conclusion que nous nous sommes laissé
convaincre trop facilement la veille. Cette clé ouvre beaucoup des serrures,
mais pas toutes. Certaines ne s’ouvrent qu’une fois forcées, d’autres ne
tournent pas du tout, même après de longs efforts. On ne nous a pas donné la
bonne clé !
Naturellement, cette petite histoire est une parabole. Les « serrures »
représentent tous les passages du Nouveau Testament où le diable, ou Satan, est
mentionné. La clé qui parvient à en ouvrir plusieurs est la croyance en Satan,
ange révolté contre Dieu, ange déchu, selon la description courante.
Mais il y a un nombre de « serrures » où cette clé ne s’engage pas du tout. En
voici quelques-unes :
1. Un certain homme de l’église de Corinthe pratiquait l’inceste. Les membres
de l’église avaient toléré cette immoralité, et Paul leur demanda d’agir. Il
dit :
« Qu’un tel homme soit livré à Satan pour
la destruction de la chair, afin que l’esprit soit sauvé au jour du Seigneur
Jésus » (1 Corinthiens 5.5).
Considérons maintenant la « clé » de la « position ange déchu » dans ce cas.
Paul dirait-il à l’église de livrer un membre pécheur à un ange déchu pour la
destruction de la chair ? Et une telle action serait-elle capable de sauver ce
pécheur « au jour du Seigneur Jésus « ? La théorie de l’ange rebelle ne cadre
pas avec ce verset. Il nous faut une clé différente.
2. Paul, se référant à deux autres chrétiens qui avaient péché, écrivit :
« Ils ont fait naufrage par rapport à la
foi. De ce nombre sont Hyménée et Alexandre, que j’ai livrés à Satan, afin
qu’ils apprennent à ne pas blasphémer » (1 Timothée 1.19‑20).
Ces versets présentent deux problèmes majeurs pour ceux qui croient en un
Satan, être surnaturel. D’abord, pourquoi Paul voudrait-il livrer ces chrétiens
égarés à un esprit méchant ? Aimeriez-vous agir ainsi envers un membre de votre
église, même s’il était pécheur ?
De plus, un ange déchu pourrait-il coopérer avec Paul pour enseigner à ces
chrétiens à ne pas blasphémer ? Assurément, un esprit méchant essaierait
d’induire les gens à blasphémer ; il ne les en guérirait pas ! Manifestement,
la théorie de l’ange déchu ne convient pas non plus ici.
3. L’église de Pergame était persécutée. Le Seigneur Jésus lui envoya un
message de réconfort, comprenant cette déclaration :
« Je sais où tu demeures, je sais que là
est le trône de Satan » (Apocalypse 2.13).
Comment cela pourrait-il se faire, si Satan est un ange déchu ? Est-ce qu’un
monstre méchant était vraiment assis sur un trône, comme roi de la ville de
Pergame ? Dans ce cas, comment une église chrétienne aurait-elle pu s’y établir
? Pourquoi les chrétiens ne s’éloignèrent-ils pas d’un tel centre d’iniquité ?
La clé qui ouvre
vraiment
Ces trois passages ne sont pas les seuls où la théorie de Satan — grand esprit
maléfique — ne convient pas. Nous allons en étudier d’autres. Mais d’abord,
essayons de tourner l’autre « clé » dans ces trois « serrures », pour voir si
l’on peut comprendre ces passages en considérant Satan comme une parabole de la
méchanceté humaine.
Revenons au premier passage, 1 Corinthiens 5.5, où Paul demande « qu’un tel homme soit livré à Satan ».
Un peu plus loin, au verset 13, Paul explique ce qu’il voulait dire : « Otez le méchant du milieu de vous ».
La clé ouvre ! « Livrer à Satan » signifie
excommunier, ou renvoyer le pécheur de l’église. On le retourne au monde d’où
il vient — au royaume de l’iniquité, où « Satan » (c’est-à-dire la nature
humaine pécheresse) règne suprême. Cette punition sévère était destinée à lui
faire voir clair en lui-même, pour le pousser à la repentance, afin qu’il fût
sauvé.
Cette clé explique aussi 1 Timothée 1.20, où Paul écrit avoir livré à Satan
deux chrétiens pécheurs « afin qu’ils
apprennent à ne pas blasphémer ». Manifestement, eux aussi
avaient été renvoyés de l’église, car, à 2 Timothée 2.16‑17, Paul
conseille à Timothée de les éviter. Il espérait sans doute que ces chrétiens
renvoyés se repentiraient et apprendraient « à ne pas blasphémer ».
Quant à Apocalypse 2.13, où il est dit de la ville de Pergame : « là est le trône de Satan », ce
verset prend du sens lorsque l’on se rend compte que Pergame était la capitale
d’une province de l’Empire romain. A cette époque-là le Gouverneur romain
persécutait les chrétiens, et en mettait quelques-uns à mort. Par ces actes
atroces il se révéla pourri de méchanceté humaine, méritant ainsi le nom de «
Satan » — « L’Ennemi ». Et le trône de ce gouverneur dangereux était en effet
dans la ville de Pergame.
De même, un autre verset du livre de l’Apocalypse révèle ainsi son sens :
« Ne crains pas ce que tu vas souffrir.
Voici, le diable jettera quelques-uns d’entre vous en prison, afin que vous
soyez éprouvés » (Apocalypse 2.10).
Quel « diable » jeta les premiers Chrétiens en prison ? Un ange déchu ? Ou le
mauvais gouvernement romain ? La réponse est évidente.
Un autre verset intéressant se comprend maintenant sans difficulté. Beaucoup de
personnes qui croient à un diable surhumain l’imaginent se glissant
silencieusement et invisiblement de par le monde. Pourtant, Pierre écrit :
« Votre adversaire, le diable, rôde comme
un lion rugissant, cherchant qui il dévorera. Résistez-lui avec une foi ferme,
sachant que les mêmes souffrances sont imposées à vos frères dans le monde
» (1 Pierre 5.8‑9).
Considérons la deuxième phrase de ce passage, tout particulièrement sa
référence aux « souffrances ». Ne saute-t-il pas aux yeux que Pierre parle des
gouverneurs cruels de l’Empire romain ? Ces hommes persécutaient sauvagement
les chrétiens, et les jetaient aux lions. C’est sans doute pour cela que Pierre
les compare à un lion rugissant. Entre parenthèses, Paul applique une
expression similaire aux autorités romaines. Lorsqu’il en fut délivré,
échappant ainsi à la mort, il s’écria : «
J’ai été délivré de la gueule du lion » (2 Timothée 4.17).
On se rend compte, petit à petit, qu’il n’y a après tout aucune contradiction
entre l’Ancien Testament et le Nouveau. Nous avons déjà examiné cinq passages
du Nouveau Testament où l’idée d’un ange rebelle ne convient pas, tandis que
l’enseignement de l’Ancien Testament — que Satan est un nom pour la nature humaine
pécheresse — les explique. Et nous sommes loin d’en avoir fini.
Encore plus de
problèmes résolus
Notre nouvelle clé nous permet de résoudre beaucoup plus de problèmes. Par
exemple, une fois le Seigneur Jésus-Christ appela Judas Iscariot « un démon » ; une autre fois il
dit à Pierre : « Arrière de moi,
Satan ! ». Il ne les accusa pas d’être possédés d’un démon ou de
Satan : il dit qu’en fait Judas était un démon et, s’adressant à Pierre, il
l’appela Satan (Jean 6.70‑71 ; Matthieu 16‑23). Que voulait dire le
Seigneur ?
Les paroles de Jésus ne sont pas difficiles à comprendre, si l’on se rappelle
l’opposition de ces deux disciples à ce moment-là. Judas avait déjà adopté une
ligne de conduite qui allait l’amener à trahir son Maître, et Pierre essayait
de persuader à Jésus de manquer à son devoir. Ainsi, ces deux hommes étaient en
train de pécher quand Jésus les réprimanda. Tous deux méritaient d’être
qualifiés de « péché humain » - c’est-à-dire de « Satan, diable ».
Un autre passage intéressant se rencontre dans le récit du chrétien infidèle,
Ananias. Cet homme décida de frustrer l’église et de mentir à l’apôtre Pierre.
Mais celui-ci, possédant le Saint-Esprit, sut dévoiler la fourberie d’Ananias.
Il lui dit :
« Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu mentes au Saint-Esprit, et que tu
aies retenu une partie du prix du champ ? … Comment as-tu pu mettre en ton cœur un pareil dessein ? » (Actes
5.3‑4).
Étudions de près les deux expressions en gras dans cette citation. La première déclare
Satan responsable du péché d’Ananias, et la deuxième affirme qu’Ananias
lui-même était responsable. Si Satan était vraiment un ange déchu, ces deux
expressions se contrediraient.
Par contre, avec la bonne clé, nous ne rencontrons ni contradiction ni
problème. Puisque Satan est un symbole de la méchanceté humaine, ces deux
expressions sont simplement deux façons différentes de dire la même chose.
Ananias s’opposait à Dieu : il se comportait en ennemi de Dieu ; il était «
l’Ennemi », Satan.
5. COMMENT LE
SEIGNEUR JÉSUS CONQUIT LE DIABLE
Jésus livra plusieurs batailles majeures à Satan, et il en sortit chaque fois
vainqueur. Dans ce chapitre nous allons les considérer et découvrir la
véritable identité de ce diable que Jésus conquit.
La Tentation dans le désert
« Jésus, le Fils de Dieu… a été tenté
comme nous en toutes choses, sans commettre de péché » (Hébreux
4.14‑15).
Le sens de ce verset est tout à fait clair. A l’opposé de nous, Jésus conquit
toujours la tentation. Il ne pécha jamais, pas une seule fois. Mais cela mis à
part, sous tous les rapports ses tentations étaient exactement semblables aux
nôtres.
Pourtant, le récit détaillé de ses terribles tentations dans le désert semble
les décrire comme très différentes des nôtres. Du moins, elles auraient été
très différentes des nôtres si le diable qui avait tenté Jésus était vraiment
un ange déchu.
Lisons les onze premiers versets de Matthieu 4, et nous le verrons. Le diable
plaça Jésus sur le haut du temple à Jérusalem et l’invita à se jeter en
bas. « Le diable le transporta encore
sur une montagne très élevée, lui montra tous les royaumes du monde et leur
gloire, et lui dit : Je te donnerai toutes ces choses, si tu te prosternes et
m’adores » (vv. 8‑9).
Ce récit est plein de difficultés pour ceux qui croient en un diable
surnaturel. Le Fils de Dieu aurait-il accepté de se rendre sur le haut du
temple ou d’une montagne en compagnie d’un ange déchu ? Aurait-il
vraisemblablement admis la possibilité de se jeter du haut du temple parce
qu’un monstre mauvais le lui aurait suggéré ? Et où trouve-t-on une montagne
d’où l’on puisse voir « tous les royaumes du monde et leur gloire » ? De toute
façon, un diable surnaturel aurait-il été assez stupide pour indiquer tous ces
royaumes et dire : « Je te donnerai
toutes ces choses » ? Jésus savait très bien que les royaumes
du monde appartiennent à Dieu, et qu’aucun ange déchu ne pourrait en disposer.
Par trois fois, l’un des chapitres de l’Ancien Testament répète que « Le Très-Haut domine sur le règne des hommes,
qu’il… donne à qui il lui plaît » (Daniel 4.17, 25, 32).
Mais une fois admis que le diable est notre nature humaine déchue, tous les
problèmes disparaissent. Comme certains l’ont reconnu, le style du récit des
tentations du Seigneur est imagé. Il décrit l’esprit de Jésus-Christ assailli
par des luttes intérieures. Le récit relate en images le même genre de luttes
intérieures dont les humains font l’expérience de jour en jour : une bataille
avec le vrai Satan — nous-mêmes ! Seulement, pour le Seigneur Jésus, la
bataille s’avéra plus intense.
Jésus venait de recevoir la puissance du Saint-Esprit, une puissance sans
limite. Il savait qu’il pouvait maintenant tout faire. Il pouvait s’imaginer
transformant des pierres en pains, sautant du haut du temple pour se retrouver
à terre indemne, conquérant le monde entier s’il le désirait.
Avait-il le droit de faire ces choses-là ? « Le diable » — c’est-à-dire les
instincts humains du Christ — lui suggérait leur côté merveilleux. Mais il
savait qu’il devait se servir de la puissance reçue de Dieu pour le bien des
autres, et non pour sa satisfaction personnelle. Aussi réprima-t-il ces
tendances typiquement humaines en s’écriant : « Retire-toi, Satan ! »
Cela nous permet aussi de comprendre un autre passage qui a toujours déconcerté
les lecteurs de la Bible qui croient en un Satan /ange déchu. A Marc 3.27,
Jésus proclame avoir déjà « lié » Satan.
Pourtant, il n’avait certainement pas « lié » un Satan surnaturel quelconque à
ce moment-là. « Lier » le Satan de la nature humaine, à laquelle il
participait, fut l’accomplissement de Jésus. Il le faisait de jour en jour, en
conquérant chaque tentation qui se présentait à lui, vivant ainsi une vie sans
péché.
Note de la rédaction: Plusieurs auteurs, y compris
Harry Whittaker, ont suggéré que le récit de la tentation contenu dans
l'évangile de Matthieu était simplement une parabole que Jésus aurait raconté à
ses disciples au sujet de sa propre préparation aux véritables tentations de
son ministère auprès du peuple juif. Le chapitre 6 de l’Évangile de Jean
contient des arguments en faveur de cette interprétation ; dans ce
chapitre, les trois tentations sont les suivantes: faire du pain, prendre le
royaume par la force et faire des miracles, et cela vient pas d'un ange
tentateur mais de la bouche du peuple. Déjà vu? Etant donné que le diable
n'existait pas dans l'Ancien Testament si ce n'était sous forme de parabole,
comment les disciples auraient-ils compris cet enseignement de leur maître Jésus, ce qui a été écrite plus tard dans Matthieu chapitre
4, quand ils l’ont entendu pour la première fois?
Comment Jésus anéantit le diable
Au moment de sa tentation, le Seigneur Jésus-Christ fut vainqueur du diable.
Tout au long de sa vie mortelle, il garda le diable « lié ». Et par sa mort, il
anéantit en fait le diable. Ce verset, écrit environ trente ans après sa mort,
nous le déclare :
« Ainsi donc, puisque les enfants
participent au sang et à la chair, il y a également participé lui-même, afin
que, par la mort, il anéantît celui qui a la puissance de la mort, c’est-à-dire
le diable » (Hébreux 2.14).
Ce passage présente beaucoup de problèmes à ceux qui croient à un diable /ange
déchu. Considérons d’abord la dernière partie du verset : le diable a la
puissance de la mort. Mais nous avons déjà établi que personne, si ce n’est
Dieu, ne peut faire mourir (Deutéronome 32.39). De plus, avant sa mort, Jésus
affirma que personne ne ravirait les disciples de sa main (Jean 10.28).
Cela nous assure qu’aucune personne, si ce n’est Dieu Lui-même, n’a jamais eu
la puissance de la mort. Il semblerait donc presque blasphématoire de suggérer
qu’un méchant ange rebelle pût avoir la puissance de la mort. Pourtant, Hébreux
2.14 insiste que le diable avait cette puissance. Cela prouve indéniablement
que le diable de ce verset ne pourrait pas être un diable surnaturel, ni même
une personne quelle qu’elle soit.
Mais maintenant, essayons la clé qui a déjà expliqué tant de passages
difficiles. Aucune personne, si ce n’est Dieu, ne possède la puissance de la
mort. Mais une chose la possède : le péché humain. Voici les deux versets qui
nous l’enseignent :
« Le salaire du péché, c’est la mort » (Romains
6.23).
« Le péché, étant consommé, produit la
mort » (Jacques 1.15).
Voilà donc, sans aucun doute, le diable de Hébreux 2.14. Le diable qui avait la
puissance de la mort, c’était le péché humain.
Reconsidérons maintenant la première partie du verset que nous étudions,
Hébreux 2.14. Remarquons sa déclaration que, pour anéantir le diable, Jésus
avait besoin de « participer » à
notre nature humaine. Cette déclaration présente encore un problème insoluble à
ceux qui croient en un diable surnaturel. Pourquoi le Christ devait-il être
humain, si la chose qu’il voulait détruire était un esprit maléfique puissant ?
Comment un être humain parviendrait-il à vaincre un tel monstre ?
Notons aussi l’affirmation de ce verset : Jésus mourut afin de détruire le
diable. Mais que pourrait détruire un homme en mourant, si ce n’est sa propre
nature humaine, ou le soi ?
Sachant maintenant que le diable est la nature humaine — qu’il est en fait
cette chose tortueuse qu’on appelle le « soi », ou l’égoïsme — tout devient
clair. Évidemment, Jésus eut à participer à notre nature humaine : autrement il
n’aurait pas eu de « diable » à anéantir ; il dut mourir, ou il n’aurait jamais
anéanti complètement le « soi ».
Avec la bonne clé en main, tout dans ce verset s’accorde et prend du sens. Le
soi, le diable / nature humaine, est trop résistant pour chacun de nous ; il a
sur nous la puissance de la mort ; il nous détruit. Mais le Seigneur
Jésus-Christ fut le seul et unique être humain à conquérir chaque tentation que
sa nature humaine lui faisait affronter. Et il continua à vaincre, jusqu’à son
dernier souffle.
La nuit précédant sa mort, il admit à son Père que sa nature humaine
appréhendait la mort sur la croix. Mais il était décidé à obéir à son Père,
plutôt qu’à ses propres tendances humaines. Il pria :
« Toutefois, que ma volonté ne se fasse
pas, mais la tienne » (Luc 22.42).
S’il avait accompli sa propre volonté pour éviter la croix, le diable de la
nature humaine l’aurait détruit. Mais il n’en fit rien. Au lieu de cela, il
accomplit la volonté de son Père. Il s’achemina avec courage vers l’agonie de sa
mort. C’est ainsi qu’il anéantit le diable.
Ce que nous avons appris
Avant de continuer, résumons-nous. Récapitulons les chapitres précédents et
leurs conclusions.
Le chapitre 1 établit une différence entre les deux interprétations du diable.
Beaucoup y ont vu un ange déchu ; d’autres ont cru que le diable est une façon
biblique de décrire la méchanceté humaine.
Au chapitre 2, nous avons rédigé la liste de toutes les références à Satan dans
l’Ancien Testament. (Le mot « diable » ne se trouve nulle part dans l’Ancien
Testament.) Manifestement, le Satan de l’Ancien Testament ressemble plus à un
diable / nature humaine qu’à un diable surnaturel.
Au chapitre 3, nous avons rapporté un témoignage historique des croyances des
anciens Juifs. Ils voyaient en Satan ce qu’on peut appeler une parabole du
péché humain. Ensuite, nous avons montré comment l’autre interprétation de
Satan se développa parmi les anciens Perses. Puis nous avons fait mention de
passages rendant impossible la croyance en un ange déchu : ces citations
montrent clairement que Dieu et Ses anges qui exécutent Ses ordres sont les
seuls esprits dans l’univers tout entier.
Aux chapitres 4 et 5, nous avons considéré plusieurs passages du Nouveau
Testament qui mentionnent le diable ou Satan. Clairement, chacun d’eux est très
difficile à comprendre pour ceux qui croient en un diable surnaturel. Mais tout
devient parfaitement compréhensible si l’on s’attache à la doctrine de l’Ancien
Testament : Satan est la méchanceté humaine.
La place nous manque pour nous arrêter à chaque mention du diable dans le
Nouveau Testament. Avec la bonne clé, il nous est facile de le faire, et nous
verrons par nous-mêmes qu’elles cadrent bien avec la doctrine du diable/nature
humaine.
Les deux seuls passages qui pourraient présenter une certaine difficulté sont
Luc 10.18 et Apocalypse 12.1‑10. Ils sont étudiés dans l’Appendice à la
fin de ce livret. (On y trouve aussi quatre autres passages difficiles qui ont
un lien avec notre sujet, bien qu’ils ne mentionnent pas le nom du diable ou de
Satan.)
Il nous faut maintenant étudier une des questions les plus difficiles de la
Bible entière. C’est le problème de ces malheureux dont nous parlent les
Évangiles, ceux que l’on disait « possédés d’un esprit impur », ou « possédés
d’un démon ».
6. LE PROBLÈME DES DÉMONIAQUES
Nous admettons que dans le Nouveau Testament les références aux démons ne sont
pas faciles à comprendre. Cependant, soyons objectifs : le problème ne se
limite pas seulement à ceux qui croient au diable / nature humaine, mais reste
tout aussi réel pour ceux qui croient en un diable surnaturel.
Les trois premiers Évangiles décrivent un nombre d’incidents dont celui-ci est
typique :
« Et voici, du milieu de la foule un homme
s’écria : Maître, je t’en prie, porte les regards sur mon fils, car c’est mon
fils unique. Un esprit le saisit, et aussitôt il pousse des cris ; et l’esprit
l’agite avec violence, le fait écumer, et a de la peine à se retirer de lui,
après l’avoir tout brisé… Jésus répondit… Amène ici ton fils. Comme il
approchait, le démon le jeta par terre, et l’agita avec violence. Mais Jésus
menaça l’esprit impur, guérit l’enfant, et le rendit à son père » (Luc
9.38‑42).
Il s’agit de la guérison d’un petit garçon très malade. Le récit de Matthieu,
relatant ce même événement (17.14‑18), décrit la maladie que l’on appelle
épilepsie. Tous les autres cas de possessions de démons dans le Nouveau
Testament se rapportent à des gens ou épileptiques, fous, sourds, muets,
aveugles, ou bien paralysés. Les maladies mortelles comme la lèpre et la fièvre
n’étaient jamais attribuées à la possession démoniaque, selon la Bible.
Supposant que Dieu eût l’intention de nous faire accepter ces récits de
possession démoniaque tels qu’ils nous sont présentés, nous avons alors à résoudre
trois questions extrêmement difficiles.
Premièrement, allons-nous supposer que la science médicale moderne ait prouvé
le manque de véracité de la Bible ? Du temps du Christ, la plupart des gens
(mais non pas tous) croyaient que la possession démoniaque causait certaines
maladies. Cette croyance s’appliquait tout spécialement à l’épilepsie, que l’on
appelait autrefois « la maladie sacrée ».
Mais de nos jours les médecins savent qu’il n’en est rien, ils connaissent la
cause véritable de ces maladies et ils savent comment les soigner. Tous les
ans, les médecins traitent avec succès, par des médicaments, des milliers de
cas d’épilepsie. Par contre, ce que les gens appellent « exorciser » — essayer
de guérir les maladies en chassant les démons — ne provoque que de la dérision
dans les milieux médicaux. Les médecins savent que dans les cas très, très
rares où l’exorcisme semble donner des résultats, l’esprit l’emporte sur la
matière.
En conséquence, presque tous les médecins sont convaincus que les peuples
primitifs des temps anciens se trompaient. Beaucoup de Grecs de l’antiquité
croyaient à la possession démoniaque, mais de nos jours nous savons qu’ils se
trompaient : cela n’existe pas. Faudrait-il croire que les auteurs inspirés du
Nouveau Testament firent la même erreur ? Sûrement pas !
La deuxième question nous laisse tout autant perplexes. Le dictionnaire indique
que « démon » était un mot dont se servaient les Grecs pour désigner beaucoup
des faux dieux qu’ils adoraient. L’apôtre Paul, comme tous les autres auteurs
du Nouveau Testament, écrivit en grec, et dans les deux versets suivants il
emploie deux fois le mot « démon » pour parler d’un dieu païen :
« Que dis-je donc ? Que la viande
sacrifiée aux idoles est quelque chose, ou qu’une idole est quelque chose ?
Nullement. Je dis que ce qu’on sacrifie, on le sacrifie à des démons, et non à
Dieu ; or, je ne veux pas que vous soyez en communion avec les démons » (1
Corinthiens 10.19‑20).
Si les cas de possession démoniaque décrits dans les Évangiles étaient réels,
il semblerait alors que les démons fussent réels, jusqu’à ce que nous nous
arrêtions pour réfléchir à ce que cela impliquerait. Comme nous l’avons déjà
vu, en grec, la langue du Nouveau Testament, le mot « démon » signifie en fait
« un dieu ». Si donc — et remarquons combien importe ce « si » — si les
premiers chrétiens parlant le grec acceptaient l’existence des démons, cela
laisserait aussi supposer qu’ils voyaient de vrais dieux dans les faux dieux.
Un troisième éclaircissement s’impose : Dieu Lui-même revendique la
responsabilité pour la surdité, le mutisme et la cécité — affections toutes
apparemment attribuées dans le Nouveau Testament aux démons. Il dit à Moïse :
« Qui a fait la bouche de l’homme ? et qui
rend muet ou sourd, voyant ou aveugle ? N’est-ce pas moi, l’Éternel ? » (Exode
4.11).
Il est difficile de croire que Dieu l’aurait dit, si c’étaient les démons qui
rendaient les hommes muets, sourds ou aveugles.
Pour ces trois raisons grand nombre de chrétiens, acceptant l’inspiration de la
Bible, refusent de croire que Dieu nous demande de prendre littéralement les
récits de possession démoniaque du Nouveau Testament. Même ceux qui croient en
un diable surnaturel sont souvent de la même opinion. Comme le font les
Christadelphes, ils estiment qu’il doit exister une meilleure explication des
références aux démons et esprits impurs dans le Nouveau Testament.
A la recherche d’une explication plus
satisfaisante
Une conclusion ressort clairement : la croyance en la possession démoniaque n’était
pas l’apanage de tout le monde dans les pays de langue grecque.
Le médecin le plus célèbre qui ait jamais vécu s’appelait Hippocrate, un Grec.
Il exerça au Ve siècle av. J‑C, mais même après 2 400 ans
nos médecins modernes lui témoignent toujours un très grand respect. Certains
de ses livres ont été conservés. L’un de ceux-ci concerne le traitement de
l’épilepsie : il y déclare que la croyance populaire en la possession
démoniaque est fausse. L’épilepsie devait recevoir un traitement médical, comme
toute autre maladie, écrivit Hippocrate.
Durant les 600 ans qui suivirent, jusqu’au IIe siècle après
Jésus-Christ, on enseigna cela à tous les médecins grecs les mieux instruits.
Une partie de son enseignement a dû être connue, probablement, des gens du peuple,
bien qu’il soit impossible de savoir combien d’entre eux l’acceptèrent, puisque
ni l’histoire ni la Bible ne nous en parlent.
Par contre, la Bible met en évidence comment les chefs religieux juifs, appelés
Pharisiens, croyaient à la fois au diable surnaturel et à la possession de
démons. Matthieu 12.27 montre qu’ils pratiquaient même l’exorcisme. Mais cela
ne prouve pas l’existence de démons. Loin de là. Les Pharisiens faisaient
souvent erreur, et, finalement, ils contribuèrent à la crucifixion du Seigneur
Jésus-Christ. Ce dernier leur dit une fois : « Vous annulez ainsi la parole de
Dieu au profit de votre tradition » (Matthieu 15.6).
La croyance des Pharisiens aux démons aide peut-être à expliquer pourquoi il y
a tant de références dans les Évangiles à la possession de démons. Toutefois
rappelons-nous toujours que beaucoup des croyances des Pharisiens étaient
erronées.
Il serait extrêmement intéressant de connaître les croyances des auteurs du
Nouveau Testament au sujet des démons. Malheureusement, ils n’ont pas jugé
nécessaire de nous le faire savoir. Ils se contentent d’y faire allusion, en
nous laissant tirer nos propres conclusions. Voyons donc ce que nous pouvons
conclure des allusions qu’ils y ont faites.
Considération
attentive des Évangiles
Étudiés avec soin, les versets suivants de l’Évangile de Matthieu sont très
utiles pour nous instruire sur la possession démoniaque :
« Le soir, on amena auprès de Jésus
plusieurs démoniaques. Il chassa les esprits par sa parole, et il guérit tous
les malades, afin que s’accomplisse ce qui avait été annoncé par Ésaïe, le
prophète : Il a pris nos infirmités, et il s’est chargé de nos maladies » (Matthieu
8.16‑17).
Ces versets cités par Matthieu sont tirés d’Ésaïe 53. La prophétie de l’Ancien
Testament et son accomplissement en Jésus-Christ se divisent tous deux en deux
parties :
LA PROPHÉTIE (Ésaïe, citée par Matthieu) :
1. Il prendrait nos infirmités
2. Il porterait nos maladies
SON ACCOMPLISSEMENT (rapporté par Matthieu) :
1. Il chassa les démons ou esprits
2. Il guérit les malades.
De toute évidence, Matthieu considérait les paroles d’Ésaïe comme se référant à
deux types de maladie : 1. les infirmités, 2. les maladies. Matthieu, lui, les
décrit ainsi : 1. possession démoniaque, 2. maladies.
Ce que Matthieu appelle « possession de démons », Ésaïe appelle « infirmités ».
De plus, Matthieu lui-même souligne que les paroles d’Ésaïe et ses propres
paroles décrivent le même événement. Il semble certain que, pour Matthieu,
l’expression « possession de démons » représentait simplement sa façon de
décrire un type de maladie.
Considérons maintenant ce passage tiré d’un autre Évangile :
« Aussitôt que Jésus fut hors de la
barque, il vint au-devant de lui un homme, sortant des sépulcres, et possédé d’un esprit impur… Jésus lui disait : Sors de cet
homme, esprit impur !… Et les esprits impurs sortirent, entrèrent dans les
pourceaux, et le troupeau se précipita des pentes escarpées dans la mer : il y
en avait environ deux mille, et ils se noyèrent dans la mer » (Marc
5.2‑13).
Notons les mots en gras. Marc commence par dire que l’homme était possédé d’un
esprit. Jésus le pensait aussi : il commanda à un esprit de sortir de l’homme.
Mais en fait, comme on l’apprend à la fin du récit, l’homme avait été possédé par
un grand nombre d’esprits.
Lorsqu’on essaie de comprendre ce récit littéralement, on finit par
s’embrouiller. Ou bien il y avait un esprit, comme l’affirme Marc au début et
comme le Seigneur Jésus le dit aussi, ou bien il y avait un grand nombre d’esprits,
comme l’explique Marc à la fin. Comment expliquer cette contradiction, si l’on
prend les esprits en question pour des êtres réels ? C’est évidemment
impossible.
Par contre, si Marc se sert de l’expression « possédé d’un esprit impur »
simplement comme d’une autre façon de dire « malade », il n’y a ni
contradiction, ni problème. Dans ce cas, possédé « d’une légion de démons »
(v.16) (ou d’un grand nombre d’esprits) veut dire tout simplement « très, très
malade ».
Peut-être penserez-vous qu’en trouvant une solution à un problème, on en
soulève un autre, encore plus compliqué. Vous paraît-il difficile de croire que
les auteurs des Évangiles pouvaient parler de possession de démons, s’ils ne
croyaient pas vraiment à ces démons ?
Si ce sont là vos sentiments, considérez ceci : nous nous servons de mots
seulement pour exprimer des idées ; ce sont les idées qui importent, et non les
mots en eux-mêmes. Il nous arrive souvent d’employer des mots qui ne sont pas
les mots justes, mais cela ne fait rien tant que nous faisons part à l’autre
personne de l’idée que nous voulons exprimer.
Pour illustrer cela, dans cette même étude, au paragraphe « Qui fut Lucifer ?
», nous avons décrit Vénus comme « l’étoile du matin ». Dans une revue
scientifique, l’emploi du mot « étoile » aurait représenté une gaffe. Vénus
n’est pas une étoile, mais une planète, ce qui est tout à fait différent. Cela
n’a aucune importance dans notre étude : le sens ressort clairement, en dépit
du manque d’exactitude du mot.
Donnons un autre exemple : de nos jours, les inondations ou ouragans peuvent
être décrits comme catastrophes naturelles par les uns, ou « Actes de Dieu »
par certains hommes de loi. Cela ne revient pas à dire que tous les hommes de
loi croient en Dieu ! Ils se servent simplement d’une expression que tout le
monde comprend, même si elle ne représente pas entièrement leur pensée.
De la même façon, beaucoup de Juifs parlaient probablement de possession de
démons sans croire réellement à l’existence de ces démons. Se référer aux démons
faisait partie d’un langage imagé, pour faire une description vivante de
certains genres de maladies particulièrement désagréables. Tous les Juifs
aimaient se servir de paraboles, et cette façon de décrire ces maladies leur
aurait paru beaucoup plus naturelle qu’elle ne nous le paraît à nous.
Deux façons de s’exprimer
Pour confirmer notre thèse, considérons le récit d’un miracle :
« Un homme vint se jeter à genoux devant
Jésus, et dit : Seigneur, aie pitié de mon fils, qui est lunatique et qui souffre
cruellement ; il tombe souvent dans le feu, et souvent dans l’eau. Je l’ai
amené à tes disciples, et ils n’ont pas pu le guérir » (Matthieu
17.14‑16).
La description claire de Matthieu ne laisse aucun doute : le jeune garçon était
malade et devait être guéri. Mais ensuite Matthieu ajoute :
« Jésus parla sévèrement au démon, qui
sortit de lui, et l’enfant fut guéri à l’heure même » (v.18).
La conclusion paraît inattendue : le simple récit d’une maladie finit en récit
de possession démoniaque.
Comment comprendre ce que Matthieu a apparemment confondu ? Il ne peut y avoir
qu’une explication raisonnable. Matthieu savait que des maladies mystérieuses
(telles que l’épilepsie dont souffrait l’enfant) et « la possession de démons »
ne faisaient réellement qu’un. Il trouva donc tout naturel d’employer avec le
même sens les deux formes d’expression.
Matthieu fait de même dans un autre chapitre :
« Alors on lui amena un démoniaque aveugle et muet, et il le guérit » (Matthieu
12.22).
Ainsi le fait Luc :
« A l’heure même, Jésus guérit plusieurs
personnes de maladies, d’infirmités et d’esprits malins… » (Luc
7.21).
On parle habituellement de « chasser
les démons et les esprits malins », alors qu’on parle de « guérir les maladies ». Mais dans les
versets que nous venons de citer, les deux idées séparées sont
interchangeables. Matthieu nous décrit un démoniaque qui fut guéri, et Luc
parle de plusieurs personnes guéries d’esprits malins. Une fois de plus, les
auteurs des Évangiles nous mettent sur la bonne voie pour comprendre ce
qu’avaient dû être leurs véritables croyances. Pour eux, évidemment, la
possession démoniaque ne représentait qu’un autre terme pour la maladie.
Pourquoi en
fut-il ainsi ?
Une dernière question subsiste : pourquoi Jésus et ses disciples ont-ils décrit
les maladies d’une façon si étrange, alors qu’il aurait été bien plus simple de
les appeler maladies ?
Malheureusement, il est impossible de répondre à cette question sans faire des
conjectures. Nous ne savons pas pourquoi, parce que Dieu n’a pas jugé bon de
nous le dire.
D’ailleurs, le Seigneur Jésus a fait beaucoup de choses que nous ne pouvons
expliquer. Un jour, alors qu’il eut besoin d’une certaine somme d’argent, il
dit à Pierre :
« Va à la mer, jette l’hameçon, et tire le
premier poisson qui viendra ; ouvre-lui la bouche, et tu trouveras un statère.
Prends-le » (Matthieu 17.27).
Pourquoi Jésus choisit-il une façon si extraordinaire d’obtenir de l’argent ?
Nous l’ignorons.
Quand il calma le tourbillon de vent sur le lac, il lui parla :
« Il menaça le vent, et dit à la mer :
Silence ! Tais-toi ! » (Marc 4.39).
Pareillement, quand il guérit une femme d’une maladie grave,
« il menaça la fièvre, et la fièvre la
quitta » (Luc 4.39).
Comment expliquer pourquoi Jésus décida de parler au vent, au lac et à la
fièvre ? Étaient-ils vivants et capables de comprendre ce qu’il disait ?
Évidemment non ! Il nous est impossible de savoir pourquoi Jésus choisit de
parler ainsi au vent, à la mer, à la fièvre. Mais, quelle qu’en soit la raison,
nous sommes sûrs que ce ne pouvait être parce que le vent, l’eau et la fièvre
étaient des êtres vivants.
Cela s’applique aussi à la possession démoniaque. Nous ne savons pas pourquoi
Jésus et ses disciples s’exprimaient quelquefois comme si les démons existaient.
Mais, quelle qu’en soit la raison, nous pouvons être assurés que ce n’était pas
parce que les démons étaient des êtres vivants.
Comme nous l’avons vu, la Bible fournit quantité de preuves qu’il n’y a pas
d’anges déchus, ni d’esprits malins en révolte contre Dieu. Rien ne peut
changer ces faits, bien que nous ne puissions comprendre la raison de l’emploi
du terme « démon » dans le Nouveau Testament.
7. D’OÙ VIENT VRAIMENT LE PÉCHÉ ?
Jusqu’ici le message de cette brochure est resté plutôt négatif. Nous n’avons
pu l’éviter. Puisque tant de gens croient que le diable est un ange déchu, nous
avons de nécessité dû commencer par montrer que ce n’est pas là l’enseignement
de la Bible.
Ce chapitre sera plus positif. Il nous incombe maintenant de montrer ce que la
Bible enseigne véritablement sur l’origine du péché. En d’autres termes, les
chapitres précédents ont démontré ce que le diable n’est pas ; ce chapitre va
montrer ce que le diable est, véritablement.
En termes clairs
Comme nous l’avons vu, les auteurs de la Bible ont souvent présenté Satan comme
une parabole du péché humain. Mais ils ne parlent pas qu’en paraboles. Parfois
ils s’expriment en termes très clairs sur la source du péché. En voici quatre
exemples :
« Le cœur (c’est-à-dire la nature humaine,
comme nous le disons de nos jours) est tortueux par-dessus tout, et il est
méchant : qui peut le connaître ? » (Jérémie 17.9).
« Car c’est du cœur que viennent les
mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les débauches, les vols, les
faux témoignages, les calomnies. Voilà les choses qui souillent l’homme » (Matthieu
15.19‑20).
« Que personne, lorsqu’il est tenté, ne
dise : C’est Dieu qui me tente. Car Dieu ne peut être tenté par le mal, et il
ne tente lui-même personne. Mais chacun est tenté quand il est attiré et amorcé
par sa propre convoitise. Puis la convoitise, lorsqu’elle a conçu, enfante le
péché » (Jacques 1.13‑15).
« D’où viennent les luttes, et d’où
viennent les querelles parmi vous ? N’est-ce pas de vos passions qui combattent
dans vos membres ? Vous convoitez, et vous ne possédez pas » (Jacques
4.1‑2).
Le message de ces quatre citations bibliques n’est que trop évident. Dieu nous
dit, en fait : N’accusez personne d’autre quand vous commettez un péché.
N’accusez pas un diable surnaturel, ni quelqu’un d’autre. Prenez-vous-en à
vous-même. Voilà d’où vient la tentation, le péché : du plus profond de votre
cœur.
L’enseignement de Paul aux Romains
S’il vous reste des doutes, lisez d’un trait dans votre Bible les huit premiers
chapitres de l’Épître de Paul aux Romains. Ils nous font un exposé
extraordinaire de la vérité sur le péché et la mort, le salut et la vie
éternelle. On y trouve sur ces points les explications les plus détaillées de
toute la Bible. Pourtant, tout au long de ces huit chapitres, il n’y a aucune
mention du diable ou de Satan.
Cela étonne ceux qui croient en un diable surnaturel. Si un ange déchu était la
vraie cause du péché humain, comment Paul pourrait-il donner une explication si
détaillée du péché et de son origine, sans même faire allusion à cet esprit
impur ?
Ils ne peuvent répondre à cette question. A celui qui garde l’esprit ouvert en
lisant l’Épître aux Romains, une conclusion s’impose : Paul ne croyait pas
qu’un ange déchu fût responsable du péché de la race humaine.
Au Chapitre 1, il décrit la méchanceté de l’humanité, mais il n’en fait pas
retomber la responsabilité sur quelque être satanique : il l’attribue au verset
24 aux « convoitises de leurs cœurs » (les
cœurs des hommes). De même, au Chapitre 2, il dit à ses lecteurs que leur péché
vient de leur « endurcissement » et
de leur « cœur impénitent » (v.
5).
Au Chapitre 3, il s’en prend à «
notre injustice » (v. 5). Il montre clairement que nous
n’avons aucune excuse (v. 19). Nous ne pouvons nous en prendre qu’à nous-mêmes.
Le Chapitre 5 va le plus droit au but. Il explique comment le péché et la mort
entrèrent dans le monde. Ce ne fut pas par un esprit impur, mais :
« Par un seul homme (Adam) le péché est entré dans le monde, et par le péché la
mort, et qu’ainsi la mort s’est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont
péché » (v. 12).
Au Chapitre 6, Paul explique qu’un chrétien doit se considérer comme « esclave de la justice » (v. 18).
Avant de devenir de vrais chrétiens, nous sommes esclaves d’un autre maître.
Qui est cet autre maître ? Si Paul avait cru en un diable surnaturel, il aurait
sûrement dit : « Vous étiez autrefois
esclaves du diable ». Mais il ne dit rien de tel. Citons ses
paroles :
« Que le péché ne règne donc point dans
votre corps mortel… Ne livrez pas vos membres au péché… Vous êtes esclaves de
celui à qui vous obéissez, soit du péché qui conduit à la mort, soit de
l’obéissance qui conduit à la justice… Vous étiez esclaves du péché… Mais
maintenant, étant affranchis du péché et devenus esclaves de Dieu… » (vv.
12‑13, 16, 20, 22).
Le péché : clairement la méchanceté humaine. Voilà notre ennemi véritable, et,
à moins de suivre le Seigneur Jésus, on est esclave du mal.
Donc, il n’y a aucun besoin de chercher hors de soi-même un esprit malin ennemi
imaginaire. Cherchons en notre for intérieur, car c’est là que se trouve le
véritable ennemi. C’est là aussi l’enseignement de Paul aux Chapitres 7 et 8 :
« Car je prends plaisir à la loi de Dieu,
selon l’homme intérieur ; mais je vois dans mes membres (un
autre terme pour sa propre nature humaine) une autre loi qui lutte contre la loi de mon entendement, et qui me
rend captif de la loi du péché qui est dans mes membres » (Romains
7.22‑23).
« Si vous vivez selon la chair (encore
un autre terme pour la nature humaine pécheresse), vous mourrez ; mais si par l’Esprit vous faites
mourir les actions du corps, vous vivrez » (Romains 8.13).
Pourquoi la Bible est-elle difficile à
comprendre ?
Cela présente un grand problème pour beaucoup de gens. Dieu veut que la Bible
soit comprise par tous. Pourquoi alors ne la présente-t-Il pas clairement pour
que ceux qui la lisent en arrivent tous aux mêmes conclusions ? Pourquoi
certains passages mentionnent-ils Satan de telle façon que beaucoup de gens, sincèrement
mais erronément, voient en Satan un ange déchu ?
Avant d’entreprendre de répondre à cette question, il faut mettre une chose au
point. Ce genre de problème s’attache aussi à d’autres doctrines que celle du
diable.
Beaucoup de gens se méprennent sur un nombre d’enseignements bibliques
importants. Certains d’entre eux, qui s’accrochent avec le plus d’acharnement à
l’idée d’un diable surnaturel — par exemple la secte des « Témoins de Jéhovah »
— sont prompts à faire remarquer que beaucoup de lecteurs de la Bible ne
comprennent pas ce que la Bible enseigne véritablement sur l’âme humaine.
Beaucoup de gens croient que l’âme est immortelle — bien que la Bible enseigne
le contraire.
Les disciples de Jésus se souciaient d’un problème pareil. « Pourquoi leur parles-tu en paraboles ? » demandèrent-ils
à leur Maître. Il répondit :
« Parce qu’il vous a été donné de
connaître les mystères du royaume des cieux, et que cela ne leur a pas été
donné. Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui
qui n’a pas on ôtera même ce qu’il a. C’est pourquoi je leur parle en
paraboles, parce qu’en voyant ils ne voient point, et qu’en entendant ils
n’entendent ni ne comprennent… Mais heureux sont vos yeux, parce qu’ils voient,
et vos oreilles parce qu’elles entendent ! » (Matthieu 13.10‑16).
Qui le désirait pouvait devenir disciple ; mais le devenant, il fallait
travailler dur. Les disciples restaient avec Jésus longtemps après que la foule
était rentrée souper. Ils trouvaient son enseignement difficile à comprendre.
Mais ils continuèrent à étudier avec le Maître, et finalement ils arrivèrent à
voir ce qu’il voulait vraiment leur dire. Selon son expression, ils
développèrent des yeux qui voient et des oreilles qui entendent.
Les foules n’étaient pas si diligentes. Elles venaient quand elles en avaient
envie, écoutaient un peu, puis s’éloignaient. En conséquence, elles manquèrent
totalement de comprendre l’enseignement du Seigneur. Selon son
expression, « en voyant ils ne voient
point, et… en entendant ils n’entendent ni ne comprennent ».
Cela n’a pas beaucoup changé. Pour comprendre la Bible, il faut travailler dur.
Mais cela en vaut la peine. C’est pour cette raison que chaque membre fidèle
des Christadelphes, qui publient ce livret, essaie de lire tous les jours au
moins un ou deux chapitres de la Bible.
Lorsqu’on ne lit la Bible que de temps en temps — par exemple le dimanche à
l’église — on ne peut pas s’attendre à bien la comprendre.
Le langage biblique
Les hommes inspirés par Dieu à écrire la Bible étaient presque tous Hébreux,
(ou comme nous le dirions de nos jours, Juifs). La plupart d’entre eux
écrivaient en langue hébraïque, et même les autres pensaient à la manière des
Hébreux. Même après sa traduction dans notre langue, on peut toujours reconnaître
dans la Bible la manière de parler hébraïque.
Les Hébreux aimaient les paraboles. Sous une forme ou une autre, le langage des
paraboles se retrouve dans presque toutes les pages de la Bible. A moins d’en
prendre conscience, on risque d’être induit en erreur.
Par exemple, Jésus dit : « Nul ne
peut servir deux maîtres… Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon » (Matthieu
6.24). On pourrait s’imaginer que Mammon était le nom d’une idole païenne, que
certains hommes adoraient au lieu d’adorer Dieu. Dans ce cas, on ferait erreur
: « Mammon » était simplement un mot hébreu qui signifiait « la richesse ».
Dans ces quelques mots, Jésus nous donna une sorte de parabole. C’est comme
s’il avait dit : « La richesse est l’idole de beaucoup de gens. Au lieu d’adorer
mon Père, ils adorent le grand dieu Richesse. Qu’ils prennent garde ! ». Les
Hébreux qui l’écoutaient ne couraient aucun risque de croire en l’existence
d’un esprit malin appelé Mammon, bien que les lecteurs modernes puissent
facilement s’y méprendre, s’ils n’y prêtent attention.
Certaines paraboles se retrouvent à travers la Bible tout entière, d’un livre à
l’autre. L’une d’elles est la parabole de Dieu et Sa femme. La nation d’Israël
(dans l’Ancien Testament) ou l’église chrétienne (dans le Nouveau Testament) y
est comparée à une femme dont le mari est Dieu ou le Christ.
Donc, la parabole que nous avons étudiée dans ce livret n’est pas unique. La
Parabole de Dieu et Son Ennemi (Satan, ou la nature humaine mauvaise) se
rencontre dans à peu près le même nombre de livres de la Bible, et est
mentionnée à peu près autant de fois, que la Parabole de Dieu et Sa Femme.
Le lecteur attentif de la Bible ne prendra littéralement aucune de ces
paraboles. Il ne s’imaginera pas que « l’épouse » de Dieu soit une femme, bien
qu’il lui soit donné un nom féminin, comme « 0hola » ou « Hephtsiba » . Il ne
supposera pas que « l’ennemi » de Dieu est un ange déchu, bien qu’il reçoive le
vilain nom de « Satan » . Et puisque toutes les paraboles ont pour but de nous
enseigner quelque chose, il recherchera la leçon importante de cette parabole
capitale de Dieu et Son Ennemi.
Tourner le mal en bien
Pour faire le premier pas qui nous mène à apprendre cette leçon, notons que
Dieu a une façon remarquable de tourner en bien le désastre humain.
Jésus-Christ était le Roi des Juifs ; mais ils ne le reconnurent pas comme tel.
Les Juifs assassinèrent leur Roi. Fut-ce une tragédie ou une bonne chose ? Ce
fut les deux à la fois. Tout meurtre est un événement terrible, mais ce meurtre
fut différent de toute autre tragédie. Dieu s’en servit pour fournir un
sacrifice pour les péchés du monde.
De manière à peu près semblable, Dieu peut même se servir d’un énoncé faux
comme fondement d’un énoncé juste ! Si cela vous semble difficile à croire,
considérez l’histoire que Jésus raconta, celle qu’on appelle la Parabole des
Mines (Luc 19.12‑27).
Dans cette parabole, un personnage de haute naissance (Jésus) donna une pièce
d’or (appelée une « mine ») à chacun de ses dix serviteurs, leur disant de les
faire valoir pendant son absence. Certains la firent valoir, mais un serviteur
paresseux ne fit rien.
Il donna comme excuse : « Seigneur,
voici ta mine, que j’ai gardée dans un linge ; car j’avais peur de toi, parce
que tu es un homme sévère ; tu prends ce que tu n’as pas déposé, et tu
moissonnes ce que tu n’as pas semé » (Luc 19.20‑21). Par
cette réponse, le serviteur paresseux calomnia son maître. Le Seigneur Jésus
n’est pas « un homme sévère »,
il ne prend pas ce qu’il n’a pas déposé, il ne moissonne pas ce qu’il n’a pas
semé.
Mais le Seigneur ne repoussa pas la calomnie. « Il lui dit : Je te juge sur tes paroles, méchant serviteur ; tu
savais que je suis un homme sévère, prenant ce que je n’ai pas déposé, et
moissonnant ce que je n’ai pas semé ; pourquoi donc n’as-tu pas mis mon argent
dans une banque, afin qu’à mon retour je le retire avec un intérêt ? » (Luc
19.22‑23).
On peut beaucoup apprendre de la réponse du Seigneur. Sa phrase
d’introduction, « Je te juge sur tes
paroles », est très significative. Cela revient à dire : «
J’accepterai ce que tu dis (bien que cela ne soit pas vrai), et je m’en
servirai pour montrer ta mauvaise conduite ».
Le Seigneur se sert plusieurs fois du même principe au cours de ses entretiens
avec ses interlocuteurs. Cela s’applique tout particulièrement à la doctrine du
diable dans le Nouveau Testament.
Les Pharisiens avaient pris le nom de Satan dans l’Ancien Testament, et
l’avaient corrompu en l’appliquant à la doctrine païenne d’un diable — dieu du
mal. Jésus ne corrige pas leur erreur. Bien que les Pharisiens se soient servis
du mot « diable » pour l’intégrer à leur faux enseignement, Jésus peut faire
bon usage de ce mot dans son propre enseignement. Il est clair, pourtant, qu’il
l’emploie différemment.
En choisissant le mot des Pharisiens, « diable », et en s’en servant comme
parabole du péché humain, tout comme l’Ancien Testament l’avait fait avec le
mot « Satan », Jésus rend plus saisissant son propre enseignement, C’est un
autre exemple de la méthode qu’il avait employée dans la Parabole des Mines
— « Je te juge sur tes paroles ».
Une leçon difficile à apprendre
De nos jours, son enseignement habile peut nous aider, si nous le lui
permettons. La description biblique du diable est horrible. A la première
lecture, cette créature mauvaise appelée Satan nous révolte. Puis, si on lit la
Bible attentivement, l’esprit s’illumine. On se dit : « Cette description
épouvantable est une parabole de la nature humaine : voilà donc ce que je suis,
moi, intérieurement ! »
Sans cette parabole remarquable pour nous éclairer, il nous serait extrêmement
difficile de comprendre, au fond du cœur, combien nous sommes vraiment
méchants. Cette image hideuse de notre nature, dépeinte comme l’ennemi de Dieu
— Satan — est la manière choisie par Dieu pour nous faire accepter la vérité
dans toute sa force écrasante. Si cela ne nous enseigne pas l’humilité et le
besoin de salut par le Seigneur Jésus-Christ, alors assurément rien d’autre ne
le fera.
8. CONCLUSIONS
Il sera utile de revenir en arrière pour résumer ce que nous avons appris.
D’abord, nous avons vu que la doctrine d’un diable, ange déchu, n’est pas
enseignée dans l’Ancien Testament. Du temps de l’Ancien Testament, les Juifs ne
croyaient pas en un diable surnaturel. Les Perses inventèrent cette croyance
(ou quelque chose de très semblable), et au début les Juifs la rejetèrent.
Mais, du temps de Jésus-Christ, beaucoup de Juifs en étaient arrivés à croire
que le diable était un ange rebelle. Parmi eux se trouvaient les ennemis de Jésus,
les Pharisiens. Néanmoins, les auteurs du Nouveau Testament donnent souvent à
entendre qu’ils ne croient pas à cette doctrine perse. Pour eux, comme pour le
Seigneur Jésus-Christ, « Satan, le diable » était une parabole de la nature
humaine méchante.
En un mot, dans la Bible entière, on ne trouve rien qui enseigne clairement la
doctrine d’un Satan surhumain, mais on y trouve en quantité ce qui la
contredit.
Cette conclusion nous mène à une question intéressante. Si cette idée d’un
diable surnaturel ne fait pas partie de l’enseignement de la Bible, pourquoi
est-ce une doctrine si populaire ? Des millions de gens adhèrent très fermement
à leur croyance en ce diable, et lorsqu’on s’entretient avec eux, ils vous
donnent quelquefois l’impression qu’ils se plaisent à y croire. Pourquoi en
est-il ainsi ?
Il y a même des gens qui vont jusqu’à faire des offrandes au diable. En fait,
les adorateurs de Satan se font de plus en plus nombreux ; ils font de la magie
noire, nous dit-on, la religion qui s’accroît le plus dans le monde. Quelle en
est la raison ?
A ces questions, une réponse très simple s’impose. Ce n’est peut-être pas la
seule raison pour la popularité de cette croyance fausse, mais c’est sans aucun
doute la plus importante : les êtres humains ont toujours essayé de rejeter sur
les autres leur propre culpabilité. Quand le tout premier homme fut surpris à
commettre le premier péché du monde, il dit à Dieu :
« La femme que tu as mise auprès de moi
m’a donné de l’arbre, et j’en ai mangé » (Genèse 3.12).
Mais la femme n’accepta pas non plus sa culpabilité. Elle se défendit ainsi :
« Le serpent m’a séduite, et j’en ai mangé
» (Genèse 3.13).
Les deux premiers pécheurs adoptèrent la même excuse : « Je ne suis pas
complètement coupable, car quelqu’un d’autre m’a tenté ! » Tout homme, toute
femme, descend de ce premier couple pécheur. A travers les âges, des millions
d’entre nous ont répété leurs excuses : « Ne me considère pas complètement
coupable, Seigneur ; songe à l’être mauvais qui m’a tenté ! »
Il est réconfortant de se défendre ainsi. Il est rassurant de penser qu’il y a
toujours au moins une créature plus mauvaise que soi. Ce sont des convictions
agréables : voilà pourquoi des millions de gens les ont toujours adoptées. Mais
c’est une consolation fausse. La Bible montre qu’aucun être surnaturel ne nous
tente. Selon la Bible, chaque pécheur est seul responsable de ses propres
péchés. Voilà le vrai diable : le cœur humain. En l’affrontant, et en lui
infligeant la défaite avec l’aide du Christ, on se lance sur la bonne voie qui
mène à la vie éternelle.
APPENDICE : QUELQUES PASSAGES
PROBLÉMATIQUES
1. Satan tombé du ciel
Il n’y a pas un seul endroit où la Bible nous présente Satan comme un ange
méchant qui fut chassé du ciel. Toutefois, on trouve deux passages du Nouveau
Testament qui parlent de Satan qui tombe du ciel. Nous allons les examiner,
pour voir comment ils s’intègrent dans l’usage que fait la Bible de Satan comme
parabole de la méchanceté humaine.
Le premier passage se trouve à Luc 10.18, où le Seigneur Jésus-Christ dit
: « Je voyais Satan tomber du ciel
comme un éclair ». Que voulait-il dire ?
Il est impossible de répondre correctement à cette question, sans répondre
d’abord à deux autres questions : Quand Jésus dit-il cela ? et A qui le dit-il
?
En lisant le chapitre 10 en entier, on voit que ce sont les premières paroles
de Jésus adressées à ses soixante-dix disciples quand ils revinrent de leur
première mission, exaltés par leur succès. Jésus les avait envoyés pour faire
deux choses : guérir les malades et annoncer le Royaume de Dieu (v.9). « Les soixante-dix revinrent avec joie, disant :
Seigneur, les démons mêmes sont soumis en ton nom ». Comme nous
l’avons vu lors de notre étude de la possession démoniaque, c’était simplement
leur façon de dire : « Seigneur, tu avais raison. Nous avons pu guérir les
genres de maladies les plus horribles ».
« Jésus leur dit : Je voyais Satan tomber
du ciel comme un éclair. » Manifestement, il se référait à ce
que les disciples venaient de lui dire, non pas à un passé lointain de quelques
milliers d’années. Évidemment, c’est quand les soixante-dix avaient « chassé
des démons » (c’est-à-dire guéri des maladies) que Jésus avait vu « Satan tomber du ciel ».
Il n’est pas difficile de voir ce que Jésus voulait probablement dire. Les
maladies et la mort étant les conséquences du péché humain, le grand problème
était donc de triompher du péché. Après cela, la conquête de la maladie était
relativement facile. Donc il n’aurait pu y avoir de guérison miraculeuse si
Jésus n’avait pas montré qu’il pouvait triompher du péché humain dans sa propre
vie. (Voir Chapitre 5 : « Comment le Seigneur Jésus conquit le diable ».)
En d’autres termes, quand les disciples « chassaient des démons » (guérissaient
des malades), cela prouvait au monde que « Satan » (le péché humain) était
vaincu, pour la première fois dans l’histoire. En langage poétique, Satan
tombait du ciel comme un éclair.
2. Le grand dragon rouge
L’autre référence à Satan tombé du ciel est celle-ci :
« Un autre signe parut encore dans le ciel
; et voici, c’était un grand dragon rouge feu, ayant sept têtes et dix cornes,
et sur ses sept têtes sept diadèmes. Sa queue entraînait le tiers des étoiles
du ciel, et les jetait sur la terre… Et il y eut guerre dans le ciel. Michel et
ses anges combattirent contre le dragon. Et le dragon et ses anges
combattirent, mais ils ne furent pas les plus forts, et leur place ne fut plus
trouvée dans le ciel. Et il fut précipité, le grand dragon, le serpent ancien,
appelé le diable et Satan, celui qui séduit toute la terre, il fut précipité
sur la terre, et ses anges furent précipités avec lui. Et j’entendis dans le
ciel une voix forte qui disait : Maintenant le salut est arrivé, ainsi que la
puissance, le règne de notre Dieu, et l’autorité de son Christ » (Apocalypse
12.3‑10).
Ce passage est difficile à comprendre. Mais une chose est très claire. Il
n’enseigne point que Satan est un ange méchant qui se révolta contre Dieu et
fut expulsé du ciel, il y a des milliers d’années. Nous pouvons en être tout à
fait sûrs, pour trois raisons.
Premièrement, le Livre de l’Apocalypse est un livre de visions. Ces visions
sont écrites en langage imagé : ce sont comme des paraboles vivantes et
surnaturelles. Elles ont toutes un sens, mais on ne peut comprendre ce sens
qu’en interprétant les images. Ce dragon appelé Satan représente quelque chose.
Ainsi le font toutes les autres caractéristiques de cette vision-parabole : ses
sept têtes avec leurs diadèmes, ses dix cornes, sa queue entraînant les étoiles,
ses anges, le ciel ; tout cela représente quelque chose. Il serait absurde de
chercher à prendre cette vision pour une histoire littérale. A-t-on jamais
entendu parler d’un ange déchu à sept têtes et dix cornes ?
Deuxièmement, le Livre de l’Apocalypse n’est pas un livre d’histoire. Sa toute
première phrase d’introduction souligne qu’il a été accordé pour montrer aux
serviteurs de Jésus-Christ « les
choses qui doivent arriver bientôt ». Il nous parle de l’avenir, et
non du passé.
Troisièmement, considérons la dernière phrase du passage cité ci-dessus. Elle
déclare qu’à la suite de la ruine du dragon, les gens vont se réjouir parce que
le royaume de Dieu est venu (Apocalypse 12.10‑12). Ceci confirme que
l’événement décrit dans cette vision doit être dans l’avenir, puisque nous
savons que le royaume de Dieu n’a pas encore été établi. C’est pourquoi les
enfants de Dieu font toujours cette prière au Père : « Que ton règne vienne ».
Ainsi donc, on ne peut pas dire ce que le diable/dragon d’Apocalypse 12 représente
exactement. Mais du moins savons-nous qu’il représente un genre de système
humain qui sera détruit avant longtemps pour faire place au royaume de Dieu
mondial. Nous pouvons être sûrs qu’il représente une puissance humaine, car les
animaux sauvages servent toujours à représenter des armées et des royaumes dans
la prophétie biblique (voir Daniel 7.17, par
exemple), et ne servent jamais à représenter des puissances surnaturelles.
3. Éprouver les esprits
« Bien-aimés, n’ajoutez pas foi à tout
esprit ; mais éprouvez les esprits, pour savoir s’ils sont de Dieu, car
plusieurs faux prophètes sont venus dans le monde. Reconnaissez à ceci l’esprit
de Dieu : tout esprit qui se déclare publiquement pour Jésus-Christ venu en
chair est de Dieu ; et tout esprit qui ne se déclare pas publiquement pour
Jésus n’est pas de Dieu » (1 Jean 4.1‑3).
Certaines personnes citent ce passage pour établir qu’il existe deux sortes
d’esprits célestes : « les esprits de
Dieu » (les anges), et «
les esprits qui ne sont pas de Dieu » (les esprits mauvais).
Mais cela n’est évidemment pas ce que ce passage signifie. La fin de la
première phrase montre que les «
esprits qui ne viennent pas de Dieu » sont en fait les « faux prophètes ».
Alors pourquoi Jean appelle-t-il ces hommes « esprits » ? Simplement parce
qu’ils prétendaient être prophètes. Les vrais prophètes parlaient sous
l’inspiration de l’Esprit de Dieu (voir 2 Pierre 1.21), et les faux prophètes
prétendaient parler, eux aussi, sous l’inspiration de l’Esprit.
Certains chrétiens du premier siècle reçurent des pouvoirs miraculeux variés,
des « dons », comme le Nouveau Testament les appelle. Paul indiqua que l’un de
ces dons était le pouvoir de discerner lesquels de ces hommes étaient les vrais
prophètes, et lesquels étaient les faux prophètes. Il l’appelle « le discernement des esprits » (1
Corinthiens 12.10).
Donc « éprouver les esprits » veut
dire ceci : quand un homme vient à vous et qu’il prétend parler sous
l’inspiration de l’Esprit de Dieu, n’acceptez pas purement et simplement son
affirmation. Examinez-le attentivement pour voir s’il parle en fait par la
puissance miraculeuse de l’Esprit de Dieu, ou si c’est un imposteur, un faux
prophète.
4. Les esprits en
prison
« Christ aussi a souffert une fois pour
les péchés… il a été mis à mort quant à la chair, et rendu vivant quant à
l’Esprit, dans lequel aussi il est allé prêcher aux esprits en prison, qui autrefois avaient été incrédules, lorsque
la patience de Dieu se prolongeait, aux jours de Noé » (1
Pierre 3.18‑20).
Les mots en gras sont quelquefois cités, hors de leur contexte, par les gens
qui croient que les esprits en prison sont les démons qui ont été détenus par
Dieu, et à qui, autrefois, Christ alla prêcher.
Mais en lisant la phrase tout entière, on peut facilement voir que ce n’est pas
là ce que dit le verset. Il nous informe que les esprits en prison étaient ceux
qui ne crurent pas, du temps de Noé. Autrement dit, il s’agit des hommes et
femmes rebelles qui se noyèrent pendant le Déluge.
Pourquoi les appelle-t-on esprits ? Nous venons de voir dans la section
précédente que les gens qui possèdent, ou qui prétendent posséder l’Esprit de
Dieu, sont appelés esprits. Dieu dit au peuple du temps de Noé : « Mon esprit ne restera pas à toujours dans l’homme,
car l’homme n’est que chair » (Genèse 6.3). C’est probablement
pour cela que Pierre appelle ces gens «
esprits ».
Comment pourrait-il être dit que Christ est allé prêcher aux hommes et femmes
incrédules du temps de Noé ? Seulement dans le sens déjà donné par Pierre à une
expression semblable au Chapitre 1 : il dit des prophètes qui avaient prédit
d’avance la venue du Christ, que «
l’Esprit de Christ… était en eux » (1 Pierre 1.11). Noé semble
avoir été prophète. Dans un autre chapitre, Pierre appelle Noé « ce prédicateur de la justice » (2
Pierre 2.5). Il semble donc que, selon le langage propre à Pierre, l’Esprit de
Christ ait été en Noé quand il prêchait la voie du salut à ses voisins.
Cette idée est en harmonie avec le passage en question, qui ne déclare pas que
Christ ait prêché à ces gens personnellement. Il affirme qu’il leur
prêcha « dans l’esprit » : « l’Esprit, dans lequel il est allé prêcher… » (1
Pierre 3.19). Il y a un parallèle intéressant à 1 Corinthiens 5.3 : Paul parle
de son message écrit, comme s’il était lui-même « présent d’esprit », et ajoute
: « Vous et mon esprit étant
assemblés ».
5. Les anges qui avaient péché
Il est préférable d’étudier ensemble les deux passages suivants, qui ont un
rapport :
« Car, si Dieu n’a pas épargné les anges
qui ont péché, mais s’il les a précipités dans les abîmes de ténèbres et les
réserve pour le jugement… » (2 Pierre 2.4) ;
« … qu’il (Dieu) a réservé pour le jugement du grand jour, enchaînés
éternellement par les ténèbres, les anges qui n’ont pas gardé leur dignité,
mais qui ont abandonné leur propre demeure… » (Jude 6).
Ceux qui croient que le diable et les démons sont des anges rebelles citent
souvent ces deux versets pour justifier leur point de vue. Mais un examen
attentif de ces deux passages montre qu’ils n’appuient pas de telles idées. Ces
anges que mentionnent Pierre et Jude — quels qu’ils soient — n’ont pas le
pouvoir de tenter les humains ou de se rendre maîtres de leurs corps. Ils sont
enchaînés en lieu sûr jusqu’au Jour du Jugement.
En fait, ce ne sont pas du tout des « anges », dans le sens généralement donné
à ce mot. Ce sont des hommes pécheurs. Il y a trois bonnes raisons de le dire.
Tout d’abord, la Bible enseigne clairement que les anges font toujours la
volonté de Dieu, et qu’ils ne peuvent ni pécher ni mourir (Matthieu 6.10 ;
18.10 ; Luc 20.36).
De plus, le terme « ange » s’applique quelquefois à de simples hommes, quand
Dieu leur donne une tâche à accomplir. Dans de tels versets, les mots hébreu et
grec pour « ange » sont traduits par « messager ». (Comme exemples, lisons
Malachie 3.1 et Matthieu 11.10, où Jean-Baptiste est appelé « ange », à la
fois dans la Bible hébraïque et la Bible grecque.)
Au cas où un doute subsisterait, examinez 2 Pierre 2.4 et Jude 6 dans votre propre Bible, et
lisez quelques versets qui les précèdent et qui les suivent. Dans les deux cas,
ces « anges » pécheurs font partie d’une liste d’hommes et femmes pécheurs
mentionnés dans l’Ancien Testament. Pierre, avant de les énumérer, présente sa
liste en disant : « Il y a eu parmi
le peuple de faux prophètes… » (2 Pierre 2.1).
Qui étaient ces « anges », ou messagers, qui avaient péché ?
A. Le Canadien Ron Abel a donné une explication
possible : que Pierre et Jude se référaient probablement aux chefs juifs,
Koré, Dathan et Abiram. (Le nom de Koré figure au verset 11 de Jude.) Ces
hommes se révoltèrent contre Dieu, et «
la terre ouvrit sa bouche, et les engloutit » (Nombres 16.32)
: en d’autres termes, ils furent «
précipités dans les abîmes ».
B. Une autre explication est devenue plus probable après
la découverte des manuscrits de la mer Morte. Nous savons maintenant que la
citation d’ «Enoch » dans Jude ne provient pas du véritable Enoch de
la Genèse, mais d’un livre apocryphe qui a circulé parmi les Juifs au premier
siècle. En fait "Voici que le Seigneur est venu avec la multitude
innombrable de ses saints, pour exécuter son jugement sur tous » vient de
1 Enoch 1: 9, ce qui est un midrash des paroles de Moïse, tirées du Deutéronome
33: 2 et pas d'un vrai Enoch. Après
cette explication, Jude et Pierre ont réfuté les affirmations du livre d’Enoch
au sujet des anges qui ont péché, illustrant le caractère illogique du faux
livre. Le mythe central du livre est que les
anges ont épousé des femmes humaines. Pourtant, Christ a dit que les anges ne
se marient pas.
6. Les esprits
méchants dans les lieux célestes
« Revêtez-vous de toutes les armes de
Dieu, afin de pouvoir tenir ferme contre les ruses du diable. Car nous n’avons
pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les dominations, contre
les autorités, contre les princes de ce monde des ténèbres, contre les esprits
méchants dans les lieux célestes » (Éphésiens 6.11‑12).
Il faut d’abord remarquer que ce passage est écrit en langage parabolique. De
fait, la section entière d’Éphésiens où il se trouve (Chapitre 6, versets 10‑17)
est un genre de parabole. Elle compare le chrétien à un soldat, revêtu d’une
armure, et portant des armes. Sa « cuirasse » est la justice, et sa « ceinture
» est la vérité. Ses « chaussures » représentent le zèle de l’Évangile, son «
bouclier » est la foi, son « casque » le salut, et son « épée » la parole de
Dieu.
Pour rappeler à ses lecteurs que les ennemis du chrétien dans cette parabole ne
sont pas de véritables soldats, Paul ajoute que « nous n’avons pas à lutter contre la chair et le
sang ». Il énumère ensuite les ennemis : (1) « les dominations, les autorités, les princes de ce
monde » ; (2) « les
esprits méchants dans les lieux célestes ».
Pour nous aider à comprendre en quoi consistent ces deux genres d’ennemis,
étudions l’autre avertissement de Paul aux Éphésiens. Nous lisons dans les
Actes des Apôtres comment Paul convoqua les anciens de l’église d’Éphèse pour
les mettre en garde contre deux dangers :
« Prenez donc garde à vous-mêmes, et à
tout le troupeau… il s’introduira parmi vous, après mon départ, des loups
cruels qui n’épargneront pas le troupeau, et… il s’élèvera du milieu de vous
des hommes qui enseigneront des choses pernicieuses, pour entraîner des
disciples après eux » (Actes 20.17, 28‑30).
Le premier danger, « des loups cruels
», était de toute évidence celui de la persécution venant du
dehors de l’église (à comparer à Matthieu 10.16‑18, qui parle aussi de
persécuteurs comme de loups attaquant les brebis du Christ). Le deuxième danger
était celui de faux docteurs à l’intérieur de l’église. Une étude en profondeur
du passage des Éphésiens montre que Paul garde toujours à l’esprit les deux
mêmes groupes d’ennemis.
« Les dominations, les autorités, les
princes de ce monde de ténèbres » paraissent être les noms
donnés par Paul aux gouverneurs romains qui persécutaient les premiers
chrétiens. Il se sert en fait des mêmes deux mots grecs, traduits ici par « dominations » et « autorités » pour désigner les
gouverneurs de l’Empire romain à Tite 3.1, où ils sont traduits par « les autorités » et « les magistrats ».
Le deuxième ennemi est appelé « les
esprits méchants dans les lieux célestes ». Voilà une expression
difficile, mais qui, en toute probabilité, s’applique de fait au deuxième
ennemi d’Actes 20 : les faux docteurs à l’intérieur de l’église. On découvre
qu’il en est ainsi en étudiant l’expression mot par mot.
« Les lieux célestes » est
une traduction d’un mot grec qui ne signifie pas littéralement « cieux ». C’est
une expression au sens figuré, dont Paul se sert plusieurs fois. Elle signifie
presque toujours « haute situation honorable ». A Éphésiens 1.3 (« bénédiction spirituelle dans les lieux célestes »),
l’expression se réfère au grand honneur d’appartenir à l’église chrétienne du
monde présent. C’est ainsi qu’on peut aussi la comprendre à Éphésiens 6.12.
Mais qui étaient ces « esprits
méchants » dans l’église naissante ? L’expression « hommes pervers » se retrouve
souvent dans l’Ancien Testament hébraïque, et veut toujours dire « hommes d’aucune valeur » ; Juges
19.22 en est un exemple. A Deutéronome 13.13, elle sert à décrire des gens qui
disent : « Allons, et servons
d’autres dieux », et Paul évoquait ce verset quand il a écrit
Éphésiens 6.12.
« Esprits méchants » est
une traduction peu exacte d’un seul mot grec, le mot « inspirés ». De toute
évidence, on se servait de ce mot dans l’église primitive pour parler de
chrétiens qui avaient le don de la prophétie reçu du Saint-Esprit — ou du moins
qui prétendaient l’avoir. Le mot apparaît aussi dans ce sens à 1 Corinthiens
14.37.
Nous voyons donc que, dans le langage dont se servent Paul et ses
lecteurs, « esprits méchants dans les
lieux célestes » voulait évidemment dire « faux prophètes dans
l’église ». Et c’est exactement ce que le passage parallèle d’Actes 20 nous a
amenés à anticiper.
Alan Hayward
The real devil